Etats-Unis : épidémie de méningite suite à des infiltrations de corticoïdes
24 morts et au moins 323 personnes infectées. C'est le lourd bilan d'une épidémie de méningite sans précédent aux Etats-Unis. L'infection rare, contractée initialement après des injections de corticoïdes contaminés par des champignons, secoue l'Amérique depuis près de deux semaines. La découverte de deux autres produits contaminés, le 16 octobre, un paralysant cardiaque et un autre corticoïde, a alimenté la psychose. A l'origine de l'épidémie, les "compounding" pharmacies sont au cœur d'une tempête médiatique qui devrait pousser les Pouvoirs Publics à légiférer sur ces lieux d'un autre temps.
Epidémie de méningite fongique
Les autorités sanitaires américaines sont en alerte depuis le 4 octobre 2012 : une épidémie de méningite fongique, secondaire initialement à des injections de corticoïdes contaminés par un champignon, frappe de plein fouet 18 états américains.
Le premier dénominateur commun de tous les sujets atteints ? Ils avaient subi un geste courant et, dans la grande majorité des cas sans danger, pour traiter leur mal de dos, à type de lombalgies ou de sciatiques : une infiltration, c'est-à-dire l'injection de corticoïdes à visée anti-inflammatoire, dans l'espace épidural, une zone qui entoure un sac contenant les racines nerveuses.
Le geste aurait pu être sans conséquence sans la présence d'un champignon, l'aspergillus fumigatus, dans les lots de corticoïdes utilisés, tous fabriqués par une même pharmacie, la New England Compounding Center (NECC), basée dans le Massachusetts.
Mais l'histoire ne s'arrête pas là: depuis le 16 octobre, trois cas de méningite fongique intéressent plus particulièrement l'Agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) dirigeant l'enquête. Ceux-ci n'avaient pas subi d'infiltration du rachis aux corticoïdes mis en cause, l'acétate de méthylprednisolone, mais l'un une infiltration à la triamcinolone (un autre type de corticoïdes) et les deux autres, une transplantation cardiaque avec un cardioplégique (un médicament permettant d'arrêter le cœur). Tous les traitements utilisés provenaient de la même pharmacie, la NECC.
Selon des éléments de l'enquête, les médecins n'avaient "aucun moyen de savoir" que les lots présentaient une contamination et il n'y a eu "aucune défaillance" dans les protocoles qu'ils ont suivis, a déclaré John Dreyzehner, responsable des services de santé de l'état, lors d'une conférence de presse.
La méningite est une infection qui s'attaque aux fines membranes enveloppant le cerveau et la moelle épinière. Dans le cas des méningites dues à Aspergillus fumigatus, l'infection est insidieuse, se développant sur des mois, et se révèle le plus souvent par des céphalées chroniques. Souvent fatales, si elles ne sont pas traitées rapidement, elles ne sont pas contagieuses contrairement aux méningites bactériennes et virales bien plus fréquentes.
Le groupe a depuis lancé un rappel de ses 17 676 doses de corticoïdes et suspendu ses opérations.
La pharmacie NECC mise en cause
Les enquêteurs ont confirmé, le 23 octobre, la culpabilité de la pharmacie à l'origine de tous les produits contaminés. "Les enquêteurs ont découvert que les procédés de stérilisation des médicaments au sein de la société de préparation pharmaceutique New England Compounding Center (NECC) n'étaient pas conformes aux normes", a expliqué mardi soir le Dr Madeleine Biondolillo, à la tête du ministère de la Santé du Massachusetts.
Une épidémie prévisible ?
Ces résultats, bien que préliminaires, jettent l'opprobre sur des pharmacies d'un genre particulier, appelée "compounding" pharmacie, un lieu où les médicaments sont préparés sur place contrairement aux médicaments des grands laboratoires pharmaceutiques.
Cette pratique peut paraître désuète, mais elle peut offrir comme avantage l'élaboration d'un traitement unique spécialement adapté à un patient.
Pourtant, des risques existent et de plus en plus de médecins les dénoncent. En effet, ces pharmacies ne sont pas tenues de respecter les mêmes critères de qualité que les grandes entreprises pharmaceutiques.
Ce n'est pas la première fois que les "compounding" pharmacies sont à l'origine d'un scandale sanitaire. Déjà en 2002, cinq personnes avaient développé une méningite fongique suite à des infiltrations de corticoïdes contaminés, provenant tous d'une pharmacie de Caroline du Sud. Lors de leur enquête sanitaire, les inspecteurs avaient mis en évidence un non respect de la stérilité lors de la préparation du médicament.
La menace d'une méningite fongique plane sur 14 000 personnes qui pourraient avoir subi une infiltration avec des corticoïdes contaminés entre le 21 mai et le 24 septembre a indiqué le Centre américain de contrôle et de prévention des maladies (CDC), tout en soulignant "que seulement un petit nombre devrait tomber malade".
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