Rougeole, oreillons, rubéole : les moins de 30 ans insuffisament immunisés
Dans son dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire, l'Institut de veille sanitaire dresse un bilan de l'impact de la vaccination "ROR" contre la rougeole, la rubéole et les oreillons plus de vingt ans après son introduction. Les autorités sanitaires s'inquiètent du risque de recrudescence d'épidémies devant les résultats de l'enquête : les personnes de moins de 30 ans seraient nombreuses à ne pas être immunisées contre ces trois maladies virales.
Une première enquête réalisée en 1998 avait montré une immunité insuffisante chez les enfants et les adolescents vis-à-vis de la rougeole, la rubéole et les oreillons. Depuis, la France s'est engagée à éradiquer ces maladies virales par la modification des recommandations vaccinales. En 2005, le nouveau calendrier vaccinal proposait pour ce faire, un abaissement de l'âge de la deuxième dose à 13-24 mois et une vaccination de rattrapage pour les sujets nés depuis 1980.
Proportion élevée des moins de 30 ans non immunisés
La séroprévalence (prévalence des anticorps) contribue à mesurer l'impact de la vaccination. Plus de dix ans après l'enquête de 1998, il était nécessaire d'estimer à nouveau la séroprévalence, pour peser les conséquences des modifications de la couverture vaccinale.
L'étude publiée dans le dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l'Institut de veille sanitaire (InVS) basée sur deux enquêtes de 2008-2009 et 2009-2010, relève une proportion encore élevée des moins de 30 ans non immunisés contre la rougeole, les oreillons et la rubéole. Les personnes nées entre 1980 et 1990 seraient moins immunisées que les générations nées avant 1980. D'après l'étude, cela s'explique par le fait que les sujets nés avant 1980 ont été soumis dès l'enfance, à l'intense circulation des virus de l'ère pré-vaccinale, alors que ceux nés à l'ère vaccinale ont été soumis à une moindre exposition aux virus, tout en étant insuffisamment vaccinés. Les moins de 30 ans non immunisés, le sont d'autant moins pour les oreillons. L'étude explique ce phénomène par l'efficacité moindre de la valence oreillons du vaccin trivalent.
L'étude pointe par ailleurs d'autres résultats pertinents :
- Les femmes de 20 à 29 ans seraient moins souvent séronégatives (c'est-à-dire plus souvent immunisées) vis-à-vis de la rougeole et de la rubéole (6,3% et 4,3% respectivement) que les hommes du même âge (11,2% et 12,9% respectivement), suggérant selon l'enquête, une bonne adhésion aux recommandations de rattrapage sélectif de vaccination chez les femmes en âge d'avoir des enfants.
- Chez les enfants de 2 à 6 ans, la séronégativité vis-à-vis de la rougeole, des oreillons et de la rubéole diffère selon le nombre de doses de vaccin ROR reçues : plus de 84% des non vaccinés étaient séronégatifs vis-à-vis des trois maladies vs 4% à 8% de ceux qui avaient reçu une dose de vaccin trivalent et moins de 4% de ceux ayant reçu deux doses de vaccin trivalent. En d'autres termes, plus ils ont reçu de doses de ROR, plus ils sont immunisés.
- La séronégativité de ces trois maladies virales n'est pas modifiée selon le pays de naissance, le niveau d'études ou la CSP des personnes.
Rougeole : une maladie à déclaration obligatoire
La rougeole, une infection virale très contagieuse transmise par voie aérienne, peut se compliquer de pneumopathies ou d'encéphalite aigue, parfois fatales. Elle est depuis 2005, une maladie à déclaration obligatoire en raison de la baisse du nombre de cas déclarés ces dernières années.
Un médecin peut suspecter une rougeole devant une fièvre supérieure ou égale à 38,5 °C, une éruption maculo-papuleuse et au moins un des signes suivants : toux ou conjonctivite ou signe de Koplik (petites taches blanchâtres dans la bouche). A la moindre alerte, il doit alors signaler le cas à l'Agence régionale de santé (ARS), sans attendre le résultat biologique. Ce signalement permet de prendre des mesures de prévention vaccinales des personnes ayant été en contact avec le patient infecté. Suite à la publication de cette étude dans le BEH, les médecins seront probablement plus sensibilisés aux vaccinations des moins de 30 ans.
Source : Séroprévalence des maladies à prévention vaccinale et de cinq autres maladies infectieuses en France. Résultats de deux enquêtes nationales 2008-2010. Agnès Lepoutre et coll. Bulletin épidémiologique hebdomadaire N°41-42. 10 décembre 2013. Institut de veille sanitaire.