Thalidomide : la condamnation du laboratoire en Espagne annulée en appel
Le laboratoire allemand Grünenthal, fabricant de la thalidomide - médicament à l'origine de malformations de milliers d'enfants dans le monde dans les années 1950-60 - avait été condamné en 2013 à indemniser les victimes espagnoles. Le jugement a été annulé en appel par un tribunal de Madrid le 13 octobre.
Le 19 novembre 2013, la justice espagnole avait donné raison à l'association des victimes de la thalidomide en Espagne, Avite, qui réclamait 204 millions d'euros pour les survivants.
Le tribunal avait condamné Grünenthal "à indemniser chaque [victime] à hauteur de 20.000 euros pour chaque point de pourcentage de leur invalidité reconnue par l'administration espagnole", sans fixer de montant global.
L'Audience provinciale a pour sa part estimé, dans son jugement du 13 octobre (rendu public mercredi 22 octobre), que la demande d'Avite n'était pas recevable car, selon elle, "les faits étaient prescrits" lorsque l'association a déposé plainte en 2012.
Cette décision peut faire l'objet d'un recours en cassation, dans un délai de vingt jours.
La condamnation était la première pour le laboratoire allemand, selon Avite. Les victimes en Allemagne avaient signé "un accord d'indemnisation au travers de la Fondation financée principalement par Grünenthal" qui a abouti au classement des plaintes dans ce pays en 1970.
Grünenthal avait présenté ses premières excuses aux victimes du monde entier en septembre 2012, soit cinquante ans après les premiers cas de malformations, affirmant être "vraiment désolé" pour son long silence.
Pendant le procès, au cours duquel des victimes étaient venues en chaise roulante ou s'appuyant sur des béquilles, la défense de la firme allemande avait encore affirmé "regretter profondément la tragédie de la thalidomide", tout en faisant valoir que les faits étaient prescrits.
Le 2 décembre 2013, les victimes australiennes de la thalidomide, ont obtenu 89 millions de dollars australiens (60 millions d'euros), au terme d'un accord financier avec le groupe britannique Diageo, qui avait racheté The Distillers Company, distributeur de ce médicament finalement interdit en 1961.
La thalidomide, vendu sous le nom de Softenon en Espagne, était prescrit aux femmes enceintes entre la fin des années 50 et le début des années 60 pour soulager les nausées. Ce médicament cause des ravages irréversibles sur le développement du fœtus. On estime généralement entre 10.000 et 20.000 le nombre des victimes de ce médicament dans le monde. Celles-ci sont nées avec des segments de bras ou de jambes manquants, des mains ou des pieds directement rattachés au tronc (phocomélie).
Interdite pendant plusieurs décennies, la thalidomide a été de nouveau autorisée dans certains pays (sous des conditions de suivi très strictes), la molécule ayant des propriétés immunomodulatrices et antitumorales.