Les dangers du glyphosate divisent la communauté scientifique
Pour la troisième fois, l'Union Européenne a repoussé le vote pour le renouvellement de l'autorisation du glyphosate, un herbicide puissant mais controversé. Les scientifiques sont divisés sur l'impact de ce produit sur la santé.
Chaque année, 8.000 tonnes de glyphosate sont pulvérisées sur les sols français. Ce pesticide est le plus utilisé par les agriculteurs et les particuliers. C’est aussi la molécule la plus étudiée par les scientifiques. Depuis plusieurs années, on la soupçonne d’être nocive pour la santé.
Un produit cancérigène ?
Selon François Veillerette, président de Générations Futures, "c’est une substance qui est soupçonnée d’avoir des effets sur le système hormonal, le système endocrinien en le perturbant. On le soupçonne aussi d’être à l’origine de certains cancers notamment celui de la lymphe, d’être lié à des maladies graves du rein et de pouvoir impacter le bon fonctionnement du foie".
Le glyphosate est-il cancérigène ? La communauté scientifique internationale reste divisée sur cette question. Le 20 mars 2015, le Centre International de Recherche Contre le Cancer (CIRC), affilié à l’Organisation mondiale de la santé, classe le désherbant "comme cancérigène probable pour l’homme". Un avis remis en cause quelques mois plus tard seulement. L’Agence Européenne de Sécurité des aliments réalise une évaluation des risques et juge, le 12 novembre 2015, ce danger cancérogène "improbable dans les conditions actuelles d’usage et d’exposition".
Un rapport de l'Union Européenne copié-collé sur celui des industriels
Une expertise européenne qui été fragilisée par la révélation de plusieurs médias européens il y a quelques jours. Des passages importants du rapport auraient été copiés-collés directement des documents rédigés par les industries agro-chimiques. François Veillerette explique : "on peut prendre par exemple l’étude des dommages du glyphosate sur l’ADN. Une partie d’un rapport de l’industrie a été copiée-collée dans le rapport de l’évaluation des risques de l’agence allemande. C’est proprement scandaleux ! On attend d’une agence sanitaire qu’elle fasse sa propre évaluation de la qualité de toutes les études disponibles. Elle ne doit pas simplement faire tourner une photocopieuse ou un traitement de texte en faisant des copiés-collés".
Mise en cause, l’agence européenne dénonce une campagne de discrédit de son évaluation scientifique du glyphosate. Dans un communiqué, elle précise : "Il est normal et nécessaire que certaines parties du dossier soumis par la compagnie apparaissent dans certaines parties du projet de rapport d’évaluation".
Malgré ce flou autour du glyphosate, l’Agence française de sécurité sanitaire (ANSES), s’est alignée en février 2016 sur les conclusions de l’agence européenne. Elle estime que "le niveau de preuve de cancérogénicité chez l’animal peut être considéré comme limité".
La France s'oppose au renouvellement de la licence du glyphosate
Face à ces inquiétudes, le gouvernement ne souhaite pas renouveler la licence du glyphosate, au nom du principe de précaution. Devant les députés, le 26 septembre dernier, le Premier ministre justifie cette décision : "La commission européenne a proposé de ré-autoriser le glyphosate pour une durée de dix ans. C’est une durée qui est trop longue et, compte tenu des incertitudes qui pèsent sur la nature de ce produit, nous avons indiqué clairement que nous ne voterions pas la proposition de la commission d’autoriser pour dix ans l’utilisation et la commercialisation de ce produit".
Le 23 octobre prochain, les pays membres de l’Union Européenne devront trancher sur le renouvellement de la licence du glyphosate pour dix ans. À moins que le vote ne soit une nouvelle fois repoussé...