Afghanistan : le skateboard comme thérapie
En 2007, un Australien, Olliver Percovich, est parti vivre à Kaboul avec ses skateboards pour suivre sa petite amie chercheuse. En circulant en skate dans la ville, il suscite un tel enthousiasme qu'il décide de créer une école gratuite. Pour le plaisir bien sûr, mais surtout pour sortir les enfants et adolescents de leur quotidien tragique. C'est la naissance de la "skateboard thérapie".
C'est parce qu'ils sont particulièrement victimes du chaos afghan que l'association Skateistan accueille les jeunes souffrant de handicap. En Afghanistan, ils n'ont pas du tout les soins dont ils auraient besoin comme la kinésithérapie, par exemple. Mais cela fait partie des surprises de cette expérience : le skate leur apporte une amélioration physique.
Face aux premiers succès afghans, l'association s'est ensuite développée en Afrique du Sud et au Cambodge. Au Cambodge, Skateistan travaille avec une autre ONG déjà présente auprès des enfants handicapés. Chacun y trouve sa façon de rouler…
Une aide diversifiée
L'association ne propose pas seulement une initiation au skateboard. La démarche a tout de suite été globale. Car tous ces enfants souffrent, et pas seulement lorsqu'ils sont handicapés. Ils souffrent de malnutrition, de maladies respiratoires, de problèmes d’hygiène dans des villes démolies par les années de conflits afghans.
Plus les années passent, plus les ateliers proposés en Afghanistan se diversifient. Dans le centre plus récent de Mazar E Sharif, un cycle a été spécialement consacré à la santé et à l'alimentation. À Kaboul, des ateliers sur les risques liés à la pollution de l'eau pour l'alimentation, mais aussi pour l'hygiène, sont proposés car la ville est traversée par des cours d'eau contaminés.
Des enfants traumatisés
À Kaboul, les attentats continuent de traumatiser les enfants. Certains ont perdu des proches dans leur village qu'ils ont dû quitter pour rejoindre la capitale, où ils ont encore vu des amis mourir à cause d'une bombe. Et cette insécurité a fait fuir beaucoup d'ONG. Les médecins et les psychologues par exemple ne sont pas assez nombreux pour aider les enfants à surmonter le poids de leurs traumatismes.
Heureusement, les installations de Skateistan sont restées totalement à l'abri des attentats. Cela permet déjà de créer un espace de sécurité très protecteur qui aide les enfants à retrouver confiance. Le skate leur apporte une activité à la fois physique et ludique. Les enfants jouent, rient, retrouvent un peu d'enfance. L'ensemble est en fait très thérapeutique.
Les filles aussi font du skateboard
Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, tout cela n'est pas uniquement réservé aux garçons, même en Afghanistan. C'est une des belles découvertes du fondateur Olliver en arrivant : personne n'avait pensé à interdire aux filles de faire du skateboard alors qu'elles n'ont pas le droit de faire du vélo par exemple ! Dès l'origine, il a donc organisé des transports particuliers pour elles. L'association leur offre un véritable espace de liberté où elles se partagent entre leur nouvelle passion et les heures de classe.
Le slogan de l'association, c'est "ils viennent pour le skate… et ils vont aussi en classe". L'enseignement y est conçu pour ces enfants qui n'ont pour la plupart jamais été scolarisés. Et l'éducation des filles en particulier est une clé pour la santé. Son impact a été mesuré pour elles-mêmes mais aussi pour leurs enfants : deux fois moins de mortalité infantile lorsque la mère a terminé le collège. Aujourd'hui, la moitié des effectifs de l'association est féminine. Et plusieurs élèves se forment pour devenir médecin ou psychologue.
Encourager l'entraide
Dans ce projet, tout est conçu pour encourager l'entraide. À Kaboul, les instructeurs ont même reçu une formation pour faire les premiers soins en cas de chute. Des compétences qui sont aujourd'hui plus souvent utilisées dans la rue après un attentat que sur les rampes de skateboard.
L'espoir, c'est que ces jeunes deviennent des adultes en bonne santé, éduqués, responsables pour accompagner à leur tour les générations suivantes vers un avenir meilleur. Un projet salué par l'Unicef en 2013 à travers le premier prix du "sport pour l'éducation".