Avoir mal quand il pleut, c’est normal?
Les personnes qui souffrent de douleurs chroniques seraient plus à risque de ressentir des symptômes les jours de pluie et de vent, selon des chercheurs de l’université de Manchester.
"Il va pleuvoir, j’ai des rhumatismes !" Est-ce que cette expression galvaudée pourrait cacher une vérité scientifique ? C’est la question que soulèvent des chercheurs de l’université de Manchester. Dans une étude qu’ils publient le 24 octobre dans la revue Nature Digital Medicine, ils rapportent qu’une météo humide et venteuse est associée à une hausse des douleurs chez les personnes qui souffrent de maladies chroniques.
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Arthrite, migraines, fibromyalgie…
Pour conduire ces travaux, les chercheurs ont collecté les données de 2.658 patients britanniques souffrant de maladies chroniques telles qu’une arthrite, une fibromyalgie, des migraines et des douleurs neuropathiques.
En pratique, les volontaires devaient enregistrer leurs symptômes chaque jour pendant maximum 15 mois sur une application conçue spécialement pour l’étude. En parallèle, leurs téléphones enregistraient les données météorologiques en fonction de leur localisation.
Un risque de douleur accru de 20% les jours de mauvais temps
Résultat : les risques de douleur étaient plus élevés de 20% les jours de pluie et de vent marqués par une chute de pression atmosphérique. "Cela signifie que, si vos chances moyennes de souffrir est de 5%, elles passeraient à 6% un jour humide et venteux" précise le professeur Will Dixon, co-auteur de l’étude, dans un communiqué de l’université de Manchester. Une augmentation des risques qui reste faible mais qui peut être "significative pour les personnes qui vivent avec des douleurs chroniques ", notent les chercheurs dans leur publication.
Les symptômes ne prédisent pas la météo
En revanche, aucun lien n’a été noté entre la douleur et la hauteur de précipitations. De même, aucune association n’a été observée entre la douleur et la température. Mais les jours froids également humides et venteux, eux, étaient associés à plus de symptômes douloureux.
Autre observation : les symptômes étaient déclarés simultanément aux jours pluvieux ou venteux et en aucun cas ils ne permettaient de prédire la météo, comme le veut la croyance populaire.
Les causes liées à l’humeur et à la sédentarité écartées
Mais comment expliquer les observations de ces chercheurs ? Le mécanisme biologique expliquant cette relation entre un temps maussade et une hausse des douleurs n’est pas encore connu mais plusieurs pistes peuvent déjà être écartées, selon les auteurs de l’étude. Tout d’abord, bien que le temps soit connu pour influencer l’humeur, et l’humeur pour influencer les douleurs, cette voie n’explique pas les résultats : même en prenant en compte l’humeur, l’association météo-douleur persiste, selon les chercheurs.
Idem, l’activité physique ne serait pas selon cette étude, à l’origine des variations des douleurs. Cela écarterait donc l’hypothèse de la sédentarité, selon laquelle les patients sortent moins lorsque la météo est mauvaise et ressentent donc plus de douleurs puisque l’activité physique possède un effet positif sur les symptômes.
Vers des prévisions des douleurs ?
Que faire de ces résultats ? Deux pistes sont intéressantes aux yeux des chercheurs de l’étude : "Etant donné que nous pouvons prévoir la météo, il serait aussi possible de développer des prévisions de la douleur connaissant la relation entre temps et douleur" propose le professeur Dixon dans le communiqué de l’université. "Ceci permettrait aux personnes qui souffrent de douleur chronique de planifier leurs activités, en réalisant des tâches plus difficiles les jours annonçant des plus faibles niveaux de douleur" poursuit-il.
Autre piste développée par le professeur : utiliser ces données pour "fournir des informations aux scientifiques intéressés par la compréhension des mécanismes de la douleur qui pourrait, à terme, ouvrir la porte à de nouveaux traitements ".
Mais avant toute chose, de plus amples études sont nécessaires pour valider cette corrélation entre météo et douleurs et comprendre si une relation de cause à effet existe. D’autant que ces travaux comportent plusieurs limites, reconnaissent les scientifiques : les personnes recrutées étaient déjà sensibilisées à l’observation de la météo et l’étude s’appuie sur leurs auto-déclarations, ce qui peut entraîner des biais.