“Le principal problème c’est un manque de personnel”
Chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris, Le Pr Eric Caumes, revient dans son livre “Urgence Sanitaire” (Robert Laffont) sur les ratés de la gestion de la crise du COVID-19.
30 000 nouveaux cas hier, 13,2% de taux de positivité pour les tests, plus de 1 900 patients hospitalisés en réanimation... L’épidémie de COVID-19 ne cesse de progresser en France. Pour freiner les contaminations, le gouvernement a imposé un couvre-feu en Ile-de-France et 8 métropoles. En première ligne pendant la première vague au printemps dernier, le Pr Eric Caumes multiplie les appels à la prudence pour éviter que les hôpitaux soient de nouveau submergés.
- Etes-vous inquiet des derniers chiffres de nouvelles contaminations ?
Pr E. Caumes : “C’est ce qu’on constate depuis plusieurs semaines : une augmentation lente et progressive mais qui apparaît comme irréversible du nombre de nouveaux cas. Il y a quelques semaines, ce n’était pas tout à fait le même profil de patients que lors de la première vague. Il s'agissait de gens plus jeunes, avec moins de comorbidités. Mais, là, progressivement, on arrive à un profil de patients à peu près identiques à ceux qu’on a vu pendant la première vague. Des personnes âgées avec des comorbidités, avec le pronostic qu’on connait.”
- Avec le couvre-feu, le gouvernement cible les bars, les restaurants et les moments de convivialité privés. Est-ce vraiment là que le virus circule le plus ?
Pr E. Caumes : “C’est très difficile à dire parce qu’on ne sait pas vraiment où le virus circule. Ça peut d’ailleurs apparaître un comble de ne pas savoir où le virus circule. On est plus de 6 mois après le début de l’épidémie. On sait où sont les clusters. Les clusters ne sont pas particulièrement dans les milieux familiaux restreints, c’est à dire dans la cellule familiale. Les gros clusters sont dans les entreprises privées et publiques, dans les hôpitaux, dans les Ehpad, dans les collèges, dans les universités...”
- Dans votre livre, vous écrivez “la gravité du COVID-19 sera liée à deux facteurs : la quasi-disparition de notre système de santé publique et la dégradation de notre système hospitalier.” Est-on mieux armé aujourd’hui pour affronter la seconde vague ?
Pr E. Caumes : “ Non, je ne peux pas vous répondre qu’on est mieux armé pour une raison très simple : le principal problème, c’est un manque de personnel. Et malheureusement pour former du personnel, il faut du temps. Former une infirmière, c’est 3 ans. Former un médecin, c’est 10 ans. Former une aide-soignante c’est un an. On ne peut pas former quelqu’un en 3 minutes.”
Retrouvez l’intégralité de l’interview du Pr Eric Caumes dans la vidéo.