Rougeole : le virus continuerait de nuire au système immunitaire après l'infection

La rougeole aurait un effet délétère sur le système immunitaire en affectant sa capacité à se souvenir des infections qu’il a déjà rencontrées, selon une nouvelle étude. Un effet qui expliquerait certaines complications liées au virus.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Le virus de la rougeole.
Le virus de la rougeole.  —  Crédits Photo : Dr. Erskine Palmer, USCDCP / Creative Commons

Les effets de la rougeole seraient-ils plus dangereux que ce que les scientifiques pensaient jusqu'à présent ? Selon des chercheurs en virologie et en génétique de l’université américaine d’Harvard et de l’institut Erasmus aux Pays-Bas, ce virus attaque le système immunitaire en effaçant sa mémoire. Ils publient leurs travaux le 1er novembre 2019 dans la revue Science.

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Mémoire immunitaire

Les scientifiques sont partis du constat que la rougeole était associée à une morbidité et une mortalité accrue, même des années après l’infection. Pour comprendre cet effet, ils ont utilisé les données de santé de 77 enfants néerlandais contaminés par la rougeole lors de l’épidémie de 2013 et d’une centaine de personnes non contaminées.

Chez les enfants infectés, les chercheurs ont comparé les échantillons de sang prélevés avant l’épidémie et deux mois après l’infection grâce à un nouvel outil appelé VirScan. Cette technique d’analyse identifie tous les virus ayant déjà infecté un organisme et dont le système immunitaire se souvient. En effet, quand le système immunitaire rencontre un virus, il crée et conserve des anticorps(1) spécifiques à ce virus qui permettront de le reconnaître et de l’éliminer rapidement en cas de nouvelle contamination. C’est le mécanisme de mémoire immunitaire.

Jusqu’à 73% des anticorps détruits

Or les analyses des chercheurs ont montré que la rougeole éliminait entre 11 et 73% des anticorps mémoire chez les enfants testés. En moyenne, les enfants infectés perdaient ainsi 20% de leur mémoire immunitaire et 16% des enfants perdaient plus de 40% de leurs anticorps.

Chez les personnes qui n’avaient pas contracté la rougeole, les changements immunitaires étaient "limités", selon les auteurs de la publication.

Une immunité aussi naïve que celle des nouveau-nés

Conséquences pour les malades : ils se retrouvent presque aussi vulnérables face aux pathogènes qu'un nouveau-né. La rougeole "remet à zéro votre système immunitaire et le fait revenir à un état plus naïf", explique à l'AFP l'épidémiologiste Michael Mina, d'Harvard, coauteur de l'étude.

Pour revenir à un niveau élevé d'anticorps et rebâtir leurs défenses, "ils doivent être réinfectés par les pathogènes, comme les nouveau-nés qui prennent beaucoup de risques dans les premières années de leur vie", dit Michael Mina. Un effet négatif qui renforce encore l'utilité de la vaccination contre ce virus.

100.000 décès par an dans le monde

L'étude, confortée par des tests sur des macaques et par une autre analyse publiée le 31 octobre dans Science Immunology, montre que le danger de la rougeole, qui compte plus de sept millions de cas et 100.000 morts par an dans le monde, dépasse donc les seuls risques liés à l'infection.

"Le virus est bien plus délétère qu'on ne croyait, ce qui rend le vaccin d'autant plus précieux", dit à l’AFP Stephen Elledge, généticien qui a développé avec des collègues l'outil VirScan.

 

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(1) Anticorps : substance de défense fabriquée par l’organisme lorsqu’il est en contact avec un pathogène. Chaque agent pathogène entraîne la fabrication d’un anticorps qui lui est spécifique.