Pollution de l’air : des particules retrouvées jusque dans le placenta
Les particules de carbone présentes dans l’air sont capables d’atteindre le placenta des femmes enceintes, selon une étude menée en Belgique. Les effets de cette contamination sur la santé du fœtus sont encore mal connus.
Jusqu’où se logent les particules polluantes que nous inhalons ? Des chercheurs belges de l’université de Hasselt et de l’université catholique de Louvain ont montré que des particules de carbone suie, des polluants issus de la combustion de bois, d’essence, de diesel ou de charbon, sont présentes à l’intérieur des placentas de femmes après leur accouchement. Ils publient leur étude dans la revue Nature Communications le 17 septembre 2019.
Jusqu’à 20.900 particules par millimètre cube de placenta
Ces travaux se sont appuyés sur les placentas de 20 femmes non-fumeuses récupérés 10 minutes après l’accouchement. Pour évaluer leur contamination aux particules polluantes, les chercheurs ont utilisé une technique d’imagerie par laser. Résultat : tous les placentas analysés contenaient des particules de carbone suie.
Les chercheurs ont ensuite voulu savoir si la pollution du lieu de résidence avait un rôle sur la quantité de particules retrouvées dans le placenta. Sur les vingt femmes enrôlées dans l’étude, dix vivaient dans une zone à haute exposition au carbone suie, définie comme une zone située à moins de 500 mètres d’un axe routier important. Les dix autres dans une zone à faible exposition, toujours dans le Nord de la Belgique.
Et, sans surprise, les femmes vivant dans les zones plus polluées présentaient des taux de particules de carbone suie dans leur placenta plus de deux fois supérieurs aux taux des femmes résidant en zone moins polluée.
Plus précisément, les chercheurs ont estimé que les placentas des femmes les moins exposées comptaient environ 9.500 particules par millimètre cube contre 20.900 pour les placentas des femmes les plus exposées.
Un chemin via la circulation sanguine
Mais comment les particules de carbone suie peuvent-elles arriver jusqu’au placenta ? Selon les scientifiques belges, "les particules de carbone suie pourraient se déplacer des poumons de la mère jusqu’au placenta" en passant "par la circulation sanguine". La barrière du placenta humain n’est donc pas infranchissable pour ces particules et une fois dans le placenta, les particules seraient susceptibles de poursuivre leur cheminement dans le sang du fœtus.
Des effets sur la santé du fœtus ?
La question est maintenant de savoir si ces particules ont un effet sur la santé du fœtus. "Nos résultats montrent que les particules de carbone suie s’accumulent du côté fœtal du placenta" écrivent tout d'abord les auteurs de l'étude. Cela suggère que "les particules de l'air ambiant peuvent être transportées vers le fœtus", ce qui peut potentiellement "expliquer le mécanisme des effets nocifs de la pollution dès les tous premiers stades de la vie" avancent les chercheurs dans leur publication.
Des petits poids de naissance, des retards de croissance et des troubles métaboliques chez les nourrissons et les enfants ont en effet été associés à des expositions aux polluants atmosphériques dans différentes études scientifiques.
Mais "jusqu’à présent, on ne sait toujours pas exactement comment ces effets indésirables sont provoqués chez le fœtus" déplorent les scientifiques. Plusieurs mécanismes potentiels ont été proposés. D'une part des mécanismes indirects, par exemple une "inflammation intra utérine" et d'autre part des mécanismes directs, par exemple par un mouvement des particules polluantes de l’air jusqu’au fœtus.
Les résultats de ces chercheurs belges sont en accord avec les études précédemment menées sur le sujet. En 2016 notamment, des chercheurs de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) avaient réussi à montrer sur des lapines que les nanoparticules de diesel inhalées pouvaient passer la barrière placentaire et passer dans la circulation du fœtus. Une contamination qui avait des conséquences sur la santé des fœtus en question.