Paris sportifs : pourquoi devient-on addict ?
Lors des événements sportifs comme la Coupe du monde, beaucoup de personnes sont tentées de s'adonner à des paris sportifs. La Dre Sarah Coscas, psychiatre addictologue à l’hôpital Paul Brousse, nous explique les dangers.
Alors que la Coupe du monde de football a démarré le 20 novembre au Qatar, des amateurs de tous les pays saisissent l'occasion pour faire des paris sportifs. Or cette activité a priori anodine peut mener à une réelle addiction, aux conséquences multiples et graves.
L'addiction est insidieuse et démarre souvent "avec un gain assez important", explique la Docteure Sarah Coscas, psychiatre addictologue à l’hôpital Paul Brousse. "L'individu va alors avoir l'impression de gagner parce qu'il s'y connaît et qu'il arrive à maîtriser le hasard". Or cette part de hasard reste, même si la personne suit le sport de près.
De l'euphorie...
S'ensuit un cercle vicieux où l'individu continue de jouer, persuadé qu'il arrivera de nouveau à remporter le gros lot. "La répétition du jeu avec des gains, des pertes, des gains, des pertes... amène à la perte de contrôle", poursuit l'addictologue. "C'est l'exposition répétée du jeu qui fait perdre le contrôle de la situation", détaille-t-elle.
Si la personne a envie de poursuivre le jeu, c'est précisément parce qu'elle vit une phase d'euphorie. "Les jeux stimulent le circuit de la récompense, du plaisir. Ce circuit est alors sur-stimulé, ce qui fait que la normale est de jouer en permanence".
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... à la descente aux enfers
La santé psychique est alors grandement atteinte. À force de perdre les jeux et de l'argent, les personnes deviennent irritables, peuvent sombrer dans une dépression..."Les joueurs finissent anéantis", déplore Sarah Coscas. Les conséquences peuvent devenir très graves : "on fait tout pour continuer de jouer, quitte à voler de l'argent dans son entreprise, mettre son foyer en péril...".
Pour autant, faut-il s'arrêter complètement de jouer pour ne pas risquer de développer une addiction ? Pas forcément, tempère la spécialiste. Il s'agit avant tout de repérer les signaux d'alerte car au-delà de la fréquence, "il y a surtout l'impact qu'a le jeu sur la personne. Le problème survient lorsque le joueur souffre de conséquences dans sa vie, que le jeu passe avant tout".
Les jeunes sont les plus touchés
De manière générale, l'addiction aux jeux d'argent touche principalement des hommes entre 30 et 40 ans, explique Sarah Coscas. Dans le cas de paris sportifs, "cette moyenne d'âge peut encore baisser", d'autant plus que les applications sur téléphone sont très prisées par les plus jeunes. "C'est tellement accessible, l'addiction devient un fléau", appuie-t-elle.
Cette forme d'addiction est "largement sous-diagnostiquée", estime la Docteure. En effet, rares sont les individus venant consulter pour cette addiction. "Les jeunes hommes souffrent de dépression, ont parfois une consommation associée, comme l'alcool". C'est au cours des entretiens que les professionnels se rendent compte de l'addiction aux paris sportifs. Et ces personnes consultent "souvent tardivement".
Une thérapie pour s'en sortir
La tendance à l'addiction peut s'expliquer par "certaines fragilités" des individus, explique Sarah Coscas. Ainsi, les personnes souffrant d'anxiété, de troubles dépressifs mais aussi présentant des pathologies psychiatriques comme la schizophrénie sont plus à risque.
Pour se détacher de son addiction, Sarah Coscas préconise une thérapie cognitivo-comportementale. "Il faut sortir de l'idée erronée que l'on maîtrise le jeu, que l'on arrivera à gagner. Pour réapprendre à contrôler les choses, on peut passer par une phase d'arrêt total".
Pour éviter d'en arriver là, des campagnes de prévention se multiplient. Pour rappel, si vous constatez qu'une personne de votre entourage joue de façon excessive, n’hésitez pas à l’orienter vers un professionnel de santé ou à l’inciter à contacter joueurs-info-service.fr ou le 09 74 75 13 13 ( accessible 7/7j de 8h à 2h) .