"Il fait ce qu'il veut. Il a un peu un droit de cuissage"
L'hôpital public n'est pas épargné par les témoignages de harcèlement sexuel, bien au contraire. Une infimière, aujourd'hui en arrêt maladie, témoigne de la violente agression dont elle a été victime de la part du chef de son service.
Justine est infirmière dans un hôpital public du sud de la France. Pendant plusieurs mois, la jeune femme a été harcelée sexuellement par un médecin. Une situation qui ira jusqu'à l'agression.
"Il me prend le visage entre les mains et puis il me force à l'embrasser. Là, je le repousse. Et cette fois, il me tient par les avant-bras, très fort j'en ai encore la sensation, et puis il me bloque. Il me dit : « J'en avais vraiment envie ». Je lui dis : « Mais, poussez-vous ! Qu'est-ce que vous faites ? Vous n'avez pas le droit de faire ça ». Il me serre par la taille, il me soulève du sol et il me ré-embrasse encore une fois...", raconte l'infirmière.
Sa hiérarchie ne la soutient pas
Cette agression intervient après plusieurs mois de remarques et de gestes déplacés. Bouleversée, Justine alerte le jour-même sa hiérarchie, qui ne lui apporte aucun soutien. L'infirmière décide de porter plainte. Cinq collègues, victimes du même médecin, acceptent de témoigner au commissariat. Mais, par peur des représailles, elles n'iront pas plus loin. Selon Justine, le médecin serait tout puissant : "Il a instauré un climat de peur dans ce service. Il fait ce qu'il veut. Il a un peu un droit de cuissage".
Depuis, Justine est en arrêt maladie. Elle est suivie par un psychiatre et prend des antidépresseurs. Pour l'accompagner dans son combat, la jeune femme a sollicité l'AFVT (Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail). Son histoire n'est pas un cas isolé. Depuis des années, c'est dans le secteur de la santé que l'association suit le plus de dossiers.
Les cas de harcèlement sexuel, très fréquents dans le milieu de la santé
Marilyn Baldeck, juriste et déléguée générale de l'AVFT, explique : "Ce sont des victimes qui ont toute la peine du monde à faire valoir leur droit car elles remettent en cause un praticien hospitalier qui a des compétences particulières et qui serait difficilement remplaçable. L'hôpital fait le choix de la réputation de l'établissement et donc de conserver le praticien plutôt que de protéger la victime pour des raisons d'organisation du service".
À l'hôpital, le sexisme, le harcèlement et les agressions sexuelles sont très souvent minimisés sous couvert d'humour carabin, d'ambiance potache de salle de garde. L'auteur de harcèlement sexuel encourt pourtant 2 ans de prison et 30.000 euros d'amende. Des sanctions qui peuvent être augmentées en cas d'abus d'autorité.