Consommer quotidiennement du paracétamol est-il sans danger ?
Les personnes qui consomment plusieurs boîtes de paracétamol par mois pourraient présenter un risque accru de développer des maladies cardiovasculaires, selon une revue de la littérature médicale publiée ce 2 mars dans la revue Annals of the Rheumatic Diseases. La prise de ce médicament semble pourrait aussi accroître le risque de troubles gastro-intestinaux et des hémorragies digestives sur le long terme. Les données disponibles, bien que limitées, incitent à une vigilance particulière pour les patients concernés.
Au-delà de 4 grammes par jour, le paracétamol peut être toxique pour le foie. Mais même en-deçà de ces doses, cet antalgique pourrait présenter d'autres effets secondaires préoccupants, chez les personnes qui en consomment sur une base régulière.
Des chercheurs britanniques ont parcouru la littérature scientifique à la recherche d'informations sur les éventuels effets secondaires de cette molécule. Seules huit études présentaient des données suffisamment riches pour se prêter à l'analyse.
- L'une de ces études, réalisée en 2006 auprès de plusieurs milliers de femmes adultes, révèle que celles prenant plus de 22 comprimés (d'au moins 500 mg) par mois présentaient un risque significativement augmenté de développer une maladie cardiovasculaire dans les douze ans (risque accru estimé entre +14% et +59%), comparées aux femmes ne consommant pas de paracétamol. Ces données sont théoriquement indépendantes de leur état de santé initial.
- Deux études réalisées en 2002 sur une population similaire montrent que les consommatrices de paracétamol ont également significativement un risque accru d'hypertension, vraisemblablement lié à la dose prise. L'effet apparaît dès un comprimé par mois, mais son intensité est diversement estimée.
- Trois études aboutissent à des conclusions analogues concernant une diminution des capacités de filtration rénale.
- Une étude met en avant un risque accru de troubles gastro-intestinaux et d'hémorragies digestives chez les patients utilisateurs de paracétamol.
- Enfin, une étude suggérant un taux de mortalité plus élevé des patients s'étant vu prescrit du paracétamol est également citée. Le contexte de la prescription médicale apparaît toutefois susceptible d'influencer fortement le résultat présenté, et empêche en outre toute extrapolation aux utilisateurs de paracétamol en automédication.
Les auteurs notent toutefois que les gros consommateurs de paracétamol ont souvent, à l'origine, des problèmes médicaux qui imposent la prise d'autres médicaments. Les données recueillies pourraient donc être moins corrélées au paracétamol lui-même qu'à ces autres substances.
Des commentateurs ont d'ores et déjà souligné que les résultats présentés "ne sont pas spécifiques au paracétamol", et semblent partagés avec d'autres analgésiques tels que l'ibuprofène. Les incertitudes liées l'effet propre de ces médicaments dans l'apparition des troubles mentionnés incitent à rester prudent.
Les auteurs de l'étude jugent néanmoins que le risque lié à la prescription de paracétamol est actuellement sous-évalué par les cliniciens. Ils plaident donc "pour que les risques d'effets indésirables [qui lui sont associés] soient mieux pris en compte" dans le calcul du rapport bénéfice/risque, lors des prescriptions.
Plus généralement, "compte tenu de la forte utilisation [du paracétamol] et du fait qu'il peut être obtenu sans prescription", il serait pour eux justifié d'examiner individuellement, "et de façon systématique", son efficacité et sa bonne tolérance.
Le paracétamol (ou acétaminophène) est le médicament le plus prescrit en France. Antalgique (anti-douleur) et antipyrétique (fait baisser la fièvre), il n'a toutefois pas de propriétés anti-inflammatoires ou anti-cicatrisation.