Baclofène : quelle place dans le traitement de la dépendance à l’alcool ?
A l’occasion de la publication par l’Agence du médicament d’un rapport d’experts sur le Baclofène, on fait le point sur l’efficacité et les effets secondaires de ce médicament dans le traitement de la dépendance à l’alcool.
Le Pr François Paille, vice-président de la Fédération française d’addictologie répond aux questions du Magazine de la santé.
- Ce rapport remet-il en cause l’efficacité du Baclofène ?
Pr François Paille : « Ce rapport ne s’appuie que sur des études dites scientifiques, avec les meilleurs niveaux de preuves dont on peut disposer, mais pas sur la vraie vie. Et la difficulté, c’est que ces études n’ont pas véritablement été faites pour démonter l’efficacité de ce médicament comme on l’utilise actuellement. Donc si on ne prend en compte que ces études, effectivement, ça n’est pas le miracle que nous avons annoncé. Mais pour prendre sa décision sur l’autorisation de mise sur le marché, l’Agence du médicament (ANSM) s’appuiera sur d’autres éléments. Si on considère que l’alcoolo-dépendance est une maladie très grave (50.000 morts), que les traitements dont on dispose ont une efficacité limitée, qu’il y a déjà beaucoup de patients qui sont traités avec du Baclofène… si on mélange tout ça on arrive à l’idée que peut-être ce médicament n’a pas l’efficacité ou le rapport bénéfice/risque que l’on attendait mais il a sa place et nous sommes favorables à ce que l’on puisse continuer à le prescrire et dans un cadre réglementé et adapté »
- Quels sont les effets secondaires de ce médicament ?
Pr François Paille : « Les effets secondaires les plus fréquents sont des troubles bénins tels que la fatigue, la somnolence etc. Mais il existe aussi des effets secondaires plus graves : des troubles dépressifs, des suicides, des décès parfois. La difficulté c’est que beaucoup de ces effets secondaires sont aussi des troubles liés à la maladie alcoolique elle-même donc par exemple, si quelqu’un se suicide, est-ce que c’est parce qu’il est alcoolo-dépendant ou est-ce que c’est à cause du médicament ? Là aussi il y a des enjeux de recherche qu’il faudra préciser »
- Est-ce qu’il existe des alternatives au Baclofène ?
Pr François Paille : « Il y a quatre autres médicaments qui sont commercialisés pour l’aide au maintien de l’abstinence. Et un médicament qui a une indication pour réduire la consommation des patients alcoolo-dépendants. Donc il y a déjà des alternatives mais elles sont limitées. Il y a un autre médicament qui est en cours d’évaluation en France, et qui à base de GHB. La difficulté c’est que le GHB a l’image de drogue de rue, récréative, parfois associée à des épisodes de sédation chimique. Le dossier est en cours d’instruction, on verra ce que ça donnera »