Benzodiazépines : comment s'en passer ?
Les Français consomment trop de benzodiazépines. La Haute Autorité de Santé a ainsi rappelé ses recommandations à l'intention des médecins pour limiter la prescription de ces médicaments indiqués contre l'anxiété et l'insomnie et faciliter l'arrêt des traitements. Car la prise de benzodiazépines a des effets à long terme sur la santé des patients et entraîne une dépendance.
À quoi servent les benzodiazépines ?
Les benzodiazépines sont des molécules qui agissent sur le système nerveux central et qui possèdent des propriétés anxiolytiques, hypnotiques et anticonvulsivantes et myorelaxantes. Elles sont prescrites dans le traitement symptomatique de l'anxiété ou des crises d'angoisse, troubles sévères du sommeil liés à des insomnies légères et transitoires, dans les manifestations du sevrage alcoolique, dans le traitement des épilepsies généralisées ou partielles ainsi que le traitement des contractures musculaires douloureuses. Il existe actuellement 22 molécules différentes.
Leur usage n'est pas anodin et peut comporter des risques : troubles de la mémoire et du comportement, altération des fonctions psychomotrices, altération de l'état de conscience qui peut entraîner insomnie, cauchemar, idées délirantes ou hallucinations… Plus les doses et la durée du traitement sont importantes, plus les risques de développer ces effets secondaires augmentent.
Pourquoi y a-t-il trop de prescriptions en France ?
Depuis les années 1990, de nombreux travaux ont souligné le niveau élevé de la consommation de médicaments psychotropes des Français, en particulier des anxiolytiques et des hypnotiques. En 2009, la France était le deuxième pays européen consommateur d'anxiolytiques (derrière le Portugal) et d'hypnotiques (derrière la Suède). Environ sept millions de personnes auraient consommé des benzodiazépines anxiolytiques en 2014 dont 16% en traitement chronique (plusieurs années).
Les benzodiazépines sont efficaces lorsqu'elles sont prescrites pour de courtes durées. Ces médicaments sont délivrés uniquement sur ordonnance et la durée de prescription est pour la plupart d'entre eux, strictement encadrée : douze semaines pour les anxiolytiques et quatre semaines pour les hypnotiques. Mais selon l'Agence nationale de sécurité du médicament, le temps de traitement médian est de sept mois pour une benzodiazépine anxiolytique et hypnotique.
Les mésusages de ces médicaments sont fréquents. Ils seraient trop souvent et longtemps prescrits par les médecins généralistes qui réalisent près de 90% des prescriptions. Certains patients vont également voir plusieurs médecins, allongeant ainsi la durée de leur traitement. Il existe aussi des cas de fausses ordonnances.
Comment savoir si on est dépendant ?
Le principal problème lié au mauvais usage des benzodiazépines est la dépendance, aussi bien physique que psychique. La dépendance physique s'installe progressivement, nécessitant une augmentation de la dose pour ressentir un effet. Elle correspond à une accoutumance, c'est-à-dire que l'organisme s'habitue au médicament.
La dépendance psychique se traduit par un besoin impérieux de consommer. L'absence du médicament provoque un manque, un mal-être ou une anxiété qui pousse à consommer de nouveau pour soulager une souffrance ou retrouver un état plaisant. Cette dépendance comporte aussi une dimension comportementale. La consommation du médicament étant favorisée par les habitudes.
Comment se sevrer ?
Un tiers des utilisateurs chroniques de ces molécules développe un syndrome de sevrage. Il est fonction de la durée de consommation et rare avant quatre mois de traitement. Mais lorsque ces médicaments sont pris pendant plusieurs mois, il ne faut jamais les arrêter du jour au lendemain sans avis médical.
"Quelle que soit la stratégie choisie, avec ou sans prise en charge spécialisée, l'arrêt doit toujours être progressif, sur une durée de quelques semaines (quatre à dix semaines le plus souvent) à plusieurs mois (consommations de longue durée, posologies élevées)", préconise la Haute Autorité de Santé. L’objectif étant de minimiser les effets du sevrage.
Il est conseillé de se faire suivre par son médecin traitant qui programmera des consultations pour suivre les effets de cette réduction, lui permettant de repérer les symptômes liés à l'arrêt du traitement ou l'apparition de symptômes nouveaux.
Les signes pouvant apparaître sont des céphalées, des douleurs et des faiblesses musculaires, un rebond d'anxiété ou d'insomnie, des cauchemars. Les signes graves sont une confusion, changements d'humeur, dépression, désorientation, hallucinations, troubles de vigilance, convulsions. Ces troubles disparaissent en deux à six semaines mais peuvent parfois se prolonger sur plus de six mois avec des fluctuations d'intensité. Le médecin prévoit également un accompagnement psychologique de soutien chez certains patients (troubles anxieux, dépressifs ou facteurs de stress importants), lorsque l’arrêt est réalisé sur une période prolongée. Si plusieurs tentatives de sevrage ont échoué, il est également possible de se faire hospitaliser.