Non, le vaccin Pfizer contre le covid ne rend pas les femmes stériles
Le vaccin Pfizer est accusé de s’attaquer à des protéines indispensables au développement du placenta. Mais cette théorie ne s’appuie sur aucune preuve et scientifiquement, elle est très peu probable. Décryptage.
C’est une des craintes qui circulent autour du vaccin anti covid Pfizer/BioNTech : qu’il rende les femmes vaccinées stériles. Cette théorie qui se propage sur les réseaux sociaux affirme en effet que le vaccin pousse le système immunitaire à s’attaquer à la syncytine-1, une protéine impliquée dans le développement du placenta. Ce qui conduirait à une infertilité des femmes vaccinées qui seraient donc dans l’incapacité de fabriquer un placenta.
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La syncytine-1 "ressemble" à la protéine S
Comment cela serait-il possible ? Le vaccin apprend au corps à fabriquer des anticorps contre une protéine du virus, la protéine S (ou Spike). Selon cette thèse, les anticorps ainsi produits pourraient aussi s’attaquer à la syncytine-1 car elle "ressemble" à la protéine S. Les deux protéines ont en effet en commun une très courte séquence de quatre acides aminés, les composants de base des protéines.
Une simple supposition
D’où vient cette idée ? Dans un texte daté du 1er décembre 2020 adressé à l’Agence européenne du médicament et repéré par l’AFP, Michael Yeadon, un ancien chercheur chez Pfizer qui a quitté l'entreprise en 2011, et un médecin allemand, Wolfang Wodarg, listent les incertitudes autour du vaccin Pfizer/BioNTech.
Ils y indiquent que si les anticorps anti-protéine S s’attaquaient à la syncytine-1, "cela empêcherait aussi la formation d'un placenta, ce qui aurait pour résultat de rendre les femmes vaccinées infertiles". Mais ils précisent également qu’il "n'y a pas d'indication" allant dans ce sens. Il ne s’agit donc que d’une simple supposition qui est, selon plusieurs spécialistes interrogés par l’AFP, hautement improbable.
"Très faible" inquiétude
Dansantila Golemi-Kotra, professeure associée de microbiologie à l'Université de York au Canada, explique tout d’abord que "l'inquiétude sur la possibilité que les anticorps ciblant ces protéines [S, ndlr] puissent attaquer la protéine syncytine-1 du placenta" en raison d’une petite ressemblance entre les deux "est très faible".
Et pour cause : l'identification de la protéine S par l'organisme "est rarement cantonnée à une seule courte séquence d'acides aminés", détaille la scientifique.
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Aucune démonstration
Et même si des séquences d'acides aminés sont communes entre les deux protéines, "ces séquences se réorganisent dans les protéines (...) pour donner une sorte de forme en trois dimensions. C'est cette forme qui est reconnue par les anticorps", explique encore Frédéric Altare, spécialiste de l’immunité et directeur de recherche à l’Inserm.
"Dans l’état actuel des connaissances, il n’y a pas de ressemblance suffisante - et il y a très peu de chances qu’il y en ait une - entre la protéine syncytine-1 et la spike'', estime encore Frédéric Altare. Il note d'ailleur que les auteurs de cette théorie "n'avancent aucune démonstration qui montrerait que les anticorps anti-spike ciblent aussi la syncytine-1".
"Quand bien même ce serait le cas, comme les anticorps ont une durée de vie limitée, toute action serait transitoire", excluant l'idée d'une infertilité durable, rassure le spécialiste.
Pas d’infertilité chez les femmes infectées
Enfin, souligne Annette Beck-Sickinger, professeure à l'Université de Leipzig en Allemagne, "si l'argument concernant la syncytine était vrai, chaque femme infectée par le virus serait par conséquent devenue stérile, mais ce n'est pas le cas".
Car les personnes infectées par le Sars-Cov-2 "ont toutes produit des anticorps anti-spike et il n'y a aucune remontée indiquant que ça ait empêché les femmes de tomber enceinte", abonde Frédéric Altare. "Si ça ne se produit pas naturellement avec le virus, il n'y a pas de raison que ça le fasse avec autre chose", conclut le spécialiste.