Chine : première plainte contre une clinique ''traitant'' l'homosexualité

Pour la première fois en Chine, un tribunal se penche sur les "thérapies de conversion", des traitements censés "soigner" l'homosexualité. Le plaignant poursuit une clinique où il a notamment subi une cure d'électrochocs censée le "réorienter" sexuellement.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Chine : première plainte contre une clinique ''traitant'' l'homosexualité

Connaissez-vous les thérapies de "conversion" sexuelle ? Ces méthodes très controversées visent à remettre dans le "droit chemin", soit le chemin hétérosexuel, gays et lesbiennes. Si certaines de ces thérapies se limitent à des techniques comportementales, d'autres méthodes se révèlent plus musclées voire barbares.

Thérapie de l'aversion

Pour la première fois en Chine, un tribunal entamait jeudi 30 juillet 2014 une procédure judiciaire à l'encontre de ces pratiques archaïques suite à la plainte d'une victime. Le tribunal du quartier de Haidian, dans l'ouest de Pékin, examine actuellement le cas d'un plaignant qui affirme avoir été traumatisé par des traitements subis dans une clinique de Chongqing. On lui aurait notamment demandé de penser à des scènes érotiques homosexuelles avant de lui administrer des électrochocs. Une pratique qui se réfère à la "thérapie par aversion".

Inventée dans les années 60 et heureusement devenue très marginale depuis les années 90, cette méthode saugrenue consiste à présenter une image faisant référence à l'homosexualité du patient (par exemple une femme nue à une lesbienne) et de l'associer à des stimulus désagréables voire franchement barbares : chocs électriques, vomitifs ou électrochocs. "Les cures d'électroconvulsivothérapie (ECT) sont des traitements médicaux qui ont un intérêt et une efficacité réels, mais limités évidemment aux vraies pathologies, comme les dépressions très sévères et rebelles aux traitements antidépresseurs", rappelle Marion Plaze psychiatre à l'hôpital Sainte-Anne. "Leurs effets secondaires ne sont pas anodins. Ils peuvent entraîner des troubles de la mémoire, irréversibles chez certains patients", précise la psychiatre.

Outre cette clinique, Xiao Zhen poursuit également en justice le géant de l'Internet chinois Baidu, premier moteur de recherche du pays, pour avoir diffusé des publicités pour l'établissement et ses "thérapies". "C'est le premier procès contre les thérapies de réorientation sexuelle en Chine", affirme à l'AFP Xiao Tie, 28 ans, directrice générale du centre LGBT de Pékin, qui soutient cette action en justice. "En Chine, ceux qui se soumettent à ces traitements le font pour la plupart sous la pression familiale. Quand ils apprennent que leur enfant est homosexuel, les parents lui ordonnent d'aller dans un hôpital psychiatrique ou de se soigner", ajoute la militante.

Charlatanisme et dinguerie

Si l'homosexualité n'est plus considérée comme un trouble psychiatrique depuis 1990 par l'OMS, ce n'est qu'en 2001 que les autorités chinoises l'ont officiellement retiré de leur liste des maladies mentales. Les gays et lesbiennes chinois font encore l'objet d'une très forte pression familiale et sociale. Les "thérapies de conversion" de tous types ont été pratiquées à travers le monde depuis le début du XXe siècle. Désormais qualifiée par la communauté médicale de "charlatanisme dangereux" et de "dinguerie", cette industrie lucrative résiste cependant dans des pays comme Singapour, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis où des récits rendus publics sur l'usage d'électrochocs alimentent cependant le débat sur son interdiction. Les Etats de Californie et du New-Jersey ont respectivement interdit les thérapies de conversion en 2012 et 2013.

De son côté, le plus grand réseau de conversions international Exodus, qui regroupait plus de 150 associations dans le monde, a fermé ses portes en 2013 après l'aveu de l'homosexualité de son directeur qui estimait que 99,9% des gays ayant subi ces stages mêlant thérapie comportementale et prêches religieux n'avaient pas changé d'orientation sexuelle.

Alors que les militants des droits homosexuels chinois espèrent que ce premier procès du genre fera jurisprudence en Chine, le tribunal pékinois devrait rendre son verdict d'ici un mois.

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