Qu'est-ce que l'obsession amoureuse ?
S'il est normal de beaucoup penser à l'être aimé lorsque l'on est amoureux, l'obsession amoureuse est pathologique, source de comportements inadaptés. Comment réagir et s'en sortir ?
Au début d'une relation, il est normal de penser très souvent à celui ou celle que l'on aime. D'après Lucy Vincent dans Comment devient-on amoureux ? aux éditions Odile Jacob, les chercheurs avaient estimé cette durée à 4 heures quotidiennes ! "L'état amoureux serait une forme de trouble obsessionnel compulsif se déroulant dans l'euphorie", affirme encore le Dr Lucy Vincent, dans son livre en se fondant sur certains scientifiques ayant étudié les caractères psychophysiologiques de l'état amoureux.
"Au début d'une relation amoureuse, réelle ou virtuelle, c'est la passion qui prime, avec les grands élans euphoriques et des symptômes de manque, confirme le Dr Laurent Karila, psychiatre et addictologue. On est accro à l'autre. La passion finalement, provoque tous les symptômes de l'addiction mais en positif."
Mais si les pensées tournent autour de l'être aimé, l'obsession serait-elle une phase normale du processus amoureux ? Pas sur le plan médical, où l'obsession est pathologique et excessive.
Des pensées et comportements excessifs
L'obsession se traduit par des pensées excessives et répétées, qui s'imposent à celui/celle qui en souffre. Elle peut se manifester dans une relation réelle, dans une relation imaginaire et idéalisée à l'extrême, où l'on se convainc d'être fait l'un pour l'autre sans se confronter à la réalité, ou encore après une rupture où l'on ressasse les bons moments passés ensemble, persuadé(e) que l'ex reviendra.
"L'obsession amoureuse emprunte à des symptômes psychiatriques comme la possessivité, la jalousie, l'érotomanie, analyse le Dr Karila. Elle devient pathologique quand il y a beaucoup de possessivité, quand une jalousie maladive s'installe, quand il y a des caractéristiques érotomaniaques (l'amour se transforme en conviction délirante d'être aimé). On attend toujours l'autre, on est dans l'espoir de recevoir et quand on ne reçoit pas, on réagit de façon négative, parfois très virulente."
L'obsession amoureuse est souvent source d'une grande angoisse, qui est soulagée par des comportements répétitifs, que l'on appelle des compulsions. En l'occurrence, dans le domaine amoureux, ces comportements tournent autour du/de la partenaire. Internet et les réseaux sociaux facilitent le phénomène de l'obsession en donnant accès à des informations intimes et en rendant aisées les vérifications.
Concrètement, pour le Dr Karila, il faut s'alerter devant certains signes : "quand on flique l'autre, notamment avec les réseaux sociaux, quand on réagit de manière inadaptée à des comportements du/de la partenaire, à des messages postés par l'autre sur Facebook. Si l'autre ne répond pas immédiatement, on est très angoissé sans comprendre. On a tendance à vérifier ce que fait l'autre, en rentrant dans son smartphone ou son ordinateur. On va envahir l'être que l'on aime, sans limite. Et cela se rapproche des symptômes décrits ci-dessus." Autre signe qui doit pousser à réagir : le fait d'être incapable de penser à autre chose.
Comment réagir ?
Il est d'abord nécessaire de prendre suffisamment de recul pour constater que les comportements obsédants sont contre-productifs et qu'ils alimentent l'angoisse. Une analyse lucide de la relation et de son avenir est indispensable.
Certains conseils pratiques sont alors à mettre en place : "il faut mettre à plat les choses et rassurer l'autre, recommande le psychiatre. Les comportements réels et virtuels doivent être modifiés : par exemple, si on appelle 50 fois par jour, il faut diminuer et on peut aussi réguler l'envoi de messages. Décider de se déconnecter l'un de l'autre du virtuel est intéressant, tout comme laisser un peu de champs libre à l'autre avec un jardin."
"C'est d'abord dans le couple qu'il faut modifier les comportements et les habitudes, puis faire une médiation si cela ne tient pas dans le temps, avec un médiateur de couple ou un thérapeute de couple", reprend le Dr Karila. Il n'est pas rare que l'obsession aboutisse à la rupture si elle est très envahissante.
Si le schéma se répète régulièrement en couple, si l'obsession provoque une souffrance, un travail auprès d'un psychologue ou d'un psychiatre semble incontournable pour comprendre les mécanismes en jeu et suivre une thérapie comportementale et cognitive. La peur d'être abandonné(e), de ne pas être assez aimable au sens premier du terme sont souvent nichées derrière une obsession amoureuse. Comprendre les mécanismes et émotions cachés derrière le phénomène obsédant, fera gagner du temps dans la résolution de la problématique.
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