La maladie d'Alzheimer au coeur d'un drame familial
Samedi 7 janvier 2012, les gendarmes ont retrouvé un couple de septuagénaires pendus dans leur maison, à Chalandry-Elaire (Ardennes). Une lettre a été retrouvée près des corps. Le mari explique que sa femme souffrait de la maladie d’Alzheimer et qu’il était devenu trop dur pour eux de continuer à vivre dans ces circonstances.
Les enquêteurs s'orientent vers la piste du meurtre suivi d'un suicide. Si les circonstances du drame étaient avérées, ce serait un nouveau drame lié à la maladie d'Alzheimer et notamment, à l'épuisement des aidants familiaux.
Trois questions à Annie de Vivie, directrice du site Internet Age Village, spécialisé sur l’aide aux personnes âgées et dépendantes :
- Ce n'est pas la première fois qu'un tel drame se produit. Comment l'expliquer ?
Annie de Vivie : "Il y a un véritable épuisement des aidants. Et même quand ça ne se termine pas de cette façon, on ressent quand même une très grande tension chez les aidants familiaux. Nous pouvons en témoigner au travers des témoignages que nous recevons sur notre site Internet et dans nos forums.
"Avec une personne en perte d'autonomie, les aidants doivent être sur le qui-vive 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Il faut également avoir une grande capacité d'écoute et d'adaptation face à des personnes adoptant des comportements perçus comme agressifs - mais qui sont en réalité défensifs, car ces personnes ne comprennent pas pourquoi elles doivent s'habiller ou faire la toilette, par exemple. Sans compter la culpabilité ressentie par beaucoup de familles à demander l'aide de professionnels, même s'il s'agit de bénéficier d'un accueil de jour. Et c'est là que le cercle vicieux peut s'enclencher, dégénérer, parfois jusqu'au drame."
- Justement, comment repérer les situations qui peuvent devenir tragiques ?
Annie de Vivie : "Le point commun dans les situations tragiques est toujours lié à l'argent. Dès que l'argent manque, vous accumulez des situations de vulnérabilité pouvant aboutir au drame. Les gens n'ont pas toujours l'argent ou la connaissance, pour accéder à des structures de répit leur permettant de souffler un peu. C'est ce qui fait qu'ils vont s'enfermer dans des situations de plus en plus coûteuses financièrement, physiquement et moralement."
- 2012 est l'année de l'élection présidentielle. Quels sont vos vœux pour les personnes dépendantes ?
Annie de Vivie : "Donner plus d'argent ne serait pas suffisant. Nous militons, tout d’abord, pour la création d’un guichet unique pour toutes les personnes en perte d'autonomie. Un numéro unique auquel elles ou leurs familles puissent s'adresser lorsqu'elles ont besoin d’aide. De sorte que les gens aient un référent et qu'ils soient bien informés et orientés.
"Ensuite, il faudrait labelliser les services d'aides aux personnes âgées malades et/ou dépendante,s ainsi que les maisons de retraites, parce que beaucoup ne savent pas où elles mettent les pieds. Et puis il faudrait bien sûr renforcer le financement de l'aide à l’autonomie parce que l'accès à des services de qualité reste encore trop cher pour les familles."
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