Michelin : fraude à l’Assurance-maladie ?
L'entreprise française Michelin aurait pousser ses employés à ne pas déclarer des accidents du travail. Ce qui représenterait une fraude importante à l'Assurance-maladie. Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Clermont-Ferrand.
Entretien avec Arnaud de Broca, juriste, secrétaire général de la FNATH, dans "Le magazine de la santé", le 1er mars 2012
Si les faits sont avérés, ce serait une fraude sans précédent à la Sécurité sociale.
La rédaction de TF1 a révélé cette semaine que Michelin était soupçonné de faire pression sur des salariés victimes d'accidents du travail, afin qu'ils ne les déclarent pas à l'Assurance-maladie. Le journaliste se fonde notamment sur une liste de l'infirmerie de l'usine de Cholet (Maine-et-Loire) de Michelin, recensant 130 jours d'arrêts non déclarés.
15 fois moins d'accidents de travail
Par ailleurs, dans une lettre de décembre 2010 de l'inspection du travail, l'inspecteur du travail écrit qu'il ressort de son enquête dans une autre usine, à Bassens (Gironde), "que les salariés victimes d'accident du travail subissent des pressions de la part de leur encadrement de proximité en vue de les faire renoncer en partie ou en totalité à un arrêt de travail".
Les syndicats confirment cette pression. François Roca, délégué syndical CGT chez Michelin et membre du Comité d'entreprise Europe, confirme de son côté les pressions. "Lorsqu'il y a un accident du travail, il y a des pressions terribles pour que le personnel ne s'arrête pas", a-t-il dit à l'AFP.
Selon Atlantico, cette attitude expliquerait peut être le record de Michelin, qui affiche quinze fois moins d'accidents de travail que la moyenne nationale.
"Une affabulation"
A Michelin, on consteste ces accusations et on parle d'"affabulation". "Les accusations portées contre Michelin sont graves et fausses. Nous en sommes scandalisés", a réagi Frantz Bléhaut, directeur des ressources humaines de Michelin pour la France. "Chez Michelin, tous les accidents de travail sont systématiquement déclarés", a-t-il dit à l'AFP, dénonçant les "affabulations" concernant les pressions sur les employés.
Quand un arrêt de travail n'est pas nécessaire, "à la suite d'un accident du travail, nous proposons de poursuivre le travail à un poste aménagé, en accord avec la personne et la médecine du travail", a expliqué Frantz Bléhaut, assurant cependant que la période entre l'accident et la reprise de fonction à un poste aménagé était indemnisée par l'entreprise et non la Sécurité sociale.
"A Cholet, en 2010, il y a eu des accidents du travail. Mais il n'y a pas eu d'accident avec des arrêts de travail", a précisé à l'AFP M. Bléhaut, alors que le reportage de TF1 accuse Michelin de jouer sur la différence entre "accidents de travail", déclarés, et "arrêts de travail", non déclarés.
Enquête ouverte
Le parquet de Clermont-Ferrand a annoncé, mercredi 29 février 2012, l'ouverture d'une enquête préliminaire sur une possible fraude à la Sécurité sociale par Michelin.
Une enquête préliminaire avait déjà été ouverte en mi-septembre concernant le site clermontois du leader français du pneumatique, dont le siège est à Clermont-Ferrand, a précisé le parquet.
Pour en savoir plus :
- TF1
"Accidents du travail : enquête sur une possible fraude chez Michelin", 29 février 2012.
- Atlantico
- "Fraude aux arrêts de travail chez Michelin : un système à grande échelle ?", 29 février 2012.
- Europe 1
- "J'étais payé chez moi", témoignage d'un salarié, 29 février 2012.