Prothèses PIP : les contrôleurs assignés au civil
Le groupe de certification allemand TÜV, qui contrôlait la qualité des prothèses PIP, est assigné vendredi 1er février 2013, au civil, devant le tribunal de commerce de Toulon.
Cinq cadres de la société PIP, dont son président Jean-Claude Mas, ont récemment été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Marseille, les audiences devant débuter mi-avril 2013. Sur le banc des victimes se trouveront, outre les femmes ayant reçu les implants défectueux, la société TÜV qui estime que PIP a usé de manoeuvres frauduleuses pour contourner les contrôles de qualité.
Cependant, cette même entreprise se trouve désormais assignée au civil devant un tribunal de commerce.
Selon les distributeurs étrangers de PIP, rejoints par quelques 400 victimes, les défauts de contrôle de TÜV lui sont entièrement imputables. Le certificateur allemand nie toute négligence en faisant valoir que son rôle se limitait, en vertu d'une directive européenne sur les dispositifs médicaux, à un audit "documentaire": vérifier la conformité du dossier de conception des prothèses et des procédures de contrôle internes à l'usine.
"TÜV n'était absolument pas chargée du contrôle du produit. TÜV n'a jamais apposé un seul tampon "CE" sur les prothèses, il ne les a jamais testées sur la chaîne de production, car ce n'était pas sa mission", martèle son avocat, Me Olivier Gutkès.
TÜV n'avait en effet été engagée qu'après la certification initiale des prothèses PIP, pour assurer des bilans annuels de qualité. La partie adverse fait cependant observer que la maison mère allemande avait fait réaliser ces opérations de contrôle par des agents de sa filiale française. Or, TÜV France n'était apparemment pas accréditée par la Commission européenne pour le contrôle de dispositifs médicaux.
TÜV victime et accusée ?
Philippe Courtois, avocat de la principale association de victimes, avait déjà critiqué la présence de TÜV sur le banc des victimes dans le procès pénal. "Les prévenus vont être condamnés mais les vrais responsables ne sont pas là. Certificateur, assureur, chirurgiens, tout le monde s'est couvert".
Le parquet rétorque qu'il n'a jamais envisagé de poursuivre le groupe allemand, dont les contrôles correspondaient à ses obligations légales. À ses yeux, tromper TÜV pour obtenir la certification des prothèses faisait partie de l'escroquerie PIP.
Derrière le débat juridique, l'enjeu est l'indemnisation des victimes, dans un dossier où les mis en cause ne sont pas solvables et où les garanties du Sarvi (Service d'aide au recouvrement des victimes d'infraction), plafonnées à 3.000 euros par personne, ne satisfont pas tout le monde, de même que la garantie d'Allianz, plafonnée à trois millions d'euros.
"Certains ne sont pas à la recherche d'un coupable, ils sont à la recherche de payeurs", déplore l'avocat de TÜV. "Or, on ne devient pas coupable au seul motif qu'on est solvable".
La Caisse nationale d'assurance maladie, qui avait porté plainte dans le dossier fin 2011, après que le gouvernement eut recommandé aux porteuses d'implants de se les faire retirer aux frais de la Sécurité sociale, voit aussi d'un mauvais oeil la position du parquet à l'égard de TÜV. Selon son avocat, elle n'a pas encore décidé si elle se constituerait partie civile à l'audience du printemps.
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