Violences faites aux femmes : un institut pour une prise en charge globale
Le premier institut consacré aux femmes victimes de tous types de violences a vu le jour dans les Yvelines. Un pas de plus pour la prise en charge des violences faites aux femmes. L'objectif de cet institut est d'accompagner la victime tant sur le plan juridique que sur le plan médico-psycho-social. Le Dr Pierre Foldès, urologue et co-fondateur de cet institut, nous en dit plus sur ce projet expérimental.
Une victime face à un parcours du combattant
La création de cet institut répond aux manques de prise en charge des services d'accueil des femmes victimes de violences. Si certains médecins savent à qui adresser ces femmes, une fois les informations utiles données, la victime entame alors un véritable parcours du combattant pour mettre en place toutes les démarches.
Elle se retrouve le plus souvent seule, pour se rendre par exemple dans une unité médico-judiciaire, afin obtenir un certificat médical descriptif, déposer une main courante ou porter plainte, trouver un nouveau logement ou encore rencontrer un avocat quand elle en a le courage. Extenuée de toutes ces démarches chronophages et angoissantes et ne se sentant pas soutenue, elle finit généralement par capituler.
66 millions d'euros consacrés au problème des violences faites aux femmes
Depuis une dizaine d'années, les professionnels et le gouvernement ont permis une évolution dans la prise en charge des violences faites aux femmes. Malheureusement, cette prise en charge est loin d'être parfaite. Seulement une femme violentée sur cent porte plainte et encore une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint (ou ex-conjoint) en France.
La répartition géographique des structures sociales est inégale, les interlocuteurs du numéro "3919" d'aide aux victimes ne sont pas disponibles 24h/24 et les médecins insuffisamment formés pour la prise en charge des violences faites aux femmes.
Pour palier ce manque, la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, a mis les bouchées doubles. Le gouvernement doit ainsi consacrer 66 millions d'euros pour combattre ce problème de santé publique qu'est celui des violences faites aux femmes.
Dans son nouveau plan triennal, la ministre prévoit de doubler le nombre d'intervenants sociaux en commissariats et brigades de gendarmerie, de faire fonctionner en continu le numéro "3919", d'améliorer la formation des professionnels et de dédier 1.650 solutions d'hébergements d'urgence supplémentaires d'ici 2017.
Un institut pour une prise en charge pluridisciplinaire
Parallèlement au gouvernement, des professionnels militent pour "venir en aide" à l'Etat. C'est le cas du Dr Pierre Foldès. Cet urologue a consacré 30 ans de sa vie à "réparer" les clitoris de femmes excisées.
Il est le co-fondateur d'un institut spécialement dédié aux femmes victimes de violences, pour tout type de violence. "Nous accueillons des femmes victimes de violences conjugales, mais aussi victimes d'inceste, de mutilations sexuelles, de violences dans le cadre professionnel", nous explique-t-il.
L'institut qui a ouvert ses portes cette semaine dans les Yvelines est une première dans la prise en charge des violences faites aux femmes. Cet institut regroupe de nombreux professionnels de santé, pour que la victime soit prise en charge dans sa globalité et que les démarches deviennent plus faciles.
Les victimes de violences se sentiront enfin "soutenues", alors qu'elles ont trop souvent le sentiment de ne pas être entendues. Alors que des établissements d'aide aux femmes victimes de violences existent déjà dans certaines villes de la métropole, elles ne sont dotées d'aucune présence médicale.
"C'est ce que nous avons souhaité mettre en place : un institut qui prend en charge la femme victime de violences, de façon multidisciplinaire, d'un point de vue médical, psychologique, social et juridique. Ce dispositif préventif se positionne en amont de la plainte", ajoute l'urologue.
Des professionnels formés à la prise en charge des victimes de violences
"Notre premier objectif est de rendre la parole à ces femmes pour qu'elles puissent enfin faire entendre leurs revendications", précise-t-il. Les femmes victimes de violences peuvent soit venir de leur plein gré, soit être adressées par un professionnel (par exemple, un médecin, un policier ou une assistante sociale).
Elles sont ensuite accueillies anonymement dans l'institut par un travailleur social qui évalue leurs besoins, afin de les placer dans un réseau de prise en charge. "Cela fait plus de six mois que nous formons des professionnels de santé pour créer notre réseau. Tous les gens du réseau sont des gens que nous formons. L'institut, ce n'est pas simplement la structure, mais l'ensemble du réseau composé de professionnels formés par l'institut", souligne le co-fondateur de l'institut.
Une fois accueillies, les femmes peuvent consulter cinq types de professionnels : un médecin, un psychologue, une assistante sociale, un juriste et une infirmière.
"Rien n'est imposé à la femme, elle choisit les professionnels qu'elle souhaite rencontrer. Si une prise en charge est nécessaire, elle se fera dans un réseau d'aval avec nos correspondants que nous avons formés", précise le Dr Foldès.
"Nous prévoyons de mettre en place ce type d'institut au niveau national avec six grandes villes susceptibles de nous suivre dans notre projet pour l'étendre à toute la métropole", conclut l'urologue.
Source : Quatrième plan de lutte contre les violences faites aux femmes. Ministère des droits des femmes.
LIRE AUSSI
- Un plan de 66 millions d'euros contre les violences faites aux femmes
- Violences envers les femmes : formons les médecins !
- Violences conjugales : le 3919 fait le plein d'appels en 2011
- Sortir des violences conjugales: les démarches
- Violences conjugales : traumatisme familial
- Excision : quand la chirurgie permet de se reconstruire