Bien conserver ses aliments
Une mauvaise conservation des aliments peut être à l'origine de sérieux problèmes de santé. Comment pouvons-nous agir, à notre niveau, pour nous protéger ? Une première étape : apprendre à bien conserver ses aliments.
"Les aliments insalubres sont à l’origine, selon les estimations, de 2 millions de décès par an - dont de nombreux enfants", selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Ainsi, les produits contenant des bactéries, des virus, des parasites ou des substances chimiques seraient "responsables de plus de 200 maladies, allant de la diarrhée aux cancers". Or, insiste l'OMS, la sécurité sanitaire des aliments "est une responsabilité partagée". Il est important de travailler sur toute la chaîne de production alimentaire - de l’agriculteur et du producteur au distributeur... et au consommateur.
Conservation au réfrigérateur : mode d'emploi
Les fraises recouvertes de moisi, la tranche de jambon oubliée pendant quelques jours qui change de couleur, le pain qui durcit... Tout cela n'est pas très ragoûtant mais fait partie du quotidien de votre cuisine. Comment bien utiliser votre frigo ? Que risque-t-on si on mange de la viande avariée ? Faut-il vraiment respecter à la lettre les dates de péremption ?
Pendant des siècles, les humains ont cherché de nombreux moyens pour conserver les denrées alimentaires afin d'assurer leur survie en période de disette. Dès la Préhistoire, on constate que la viande se conserve mieux au contact de la fumée, c'est le principe de la fumaison encore utilisée de nos jours. Dans l'Antiquité, on utilisait le sel. Et les Romains ont très vite saisi l'intérêt du froid en enveloppant les poissons du Rhin dans de la neige ou de la glace pour les transporter jusqu'à Rome.
L'idée a fait son chemin et c'est vers le milieu du XIXe siècle seulement que les premières machines industrielles à réfrigérer sont mises au point. En France, en 1859 Ferdinand Carré crée la première machine à faire de la glace. Mais il faut attendre 1913 pour que soit fabriqué à Chicago le premier réfrigérateur domestique à électricité.
Une famille de quatre personnes ouvre et ferme son frigo près de 70 fois par jour, il met ensuite près de deux heures à re-stabiliser sa température. Cela n'est pas sans conséquence sur la conservation des aliments. Alors comment bien utiliser son frigo et son comparse le congélateur ?
Première règle : tout ce qui se trouve à l'intérieur du réfrigérateur doit être emballé. Boîtes à couvercle hermétique, sachet fraîcheur ou encore papier cellophane ou aluminum pour éviter que les germes d'un aliment ne contaminent son voisin.
Ensuite, chaque aliment doit être placé à la bonne place. Dans le bac à légumes, en toute logique, rangez vos légumes préalablement nettoyés. Juste au-dessus, positionnez tous les aliments crus. Tout en haut du frigo, rangez les aliments cuits et les laitages.
Retirez les emballages en carton qui freinent la circulation de l'air froid. Nettoyez régulièrement (deux fois par mois dans l'idéal) votre réfrigérateur avec une éponge propre et du vinaigre blanc.
Les moyens de conservation à travers les époques
Conserver des aliments sans réfrigérateur, c'est possible et c'est ce qu'ont fait nos ancêtres. Fermentation, salage, fumage… Les moyens de conservation des aliments se sont diversifiés au fil des siècles, voire des millénaires.
Des pierres, des lances… Si dès la Préhistoire, l'homme trouve des moyens pour chasser l'animal, il a plus de difficulté pour conserver les fruits de sa chasse. Mais il y a environ 400.000 ans, tout change : l'homme découvre le feu. "L'homme sachant maîtriser le feu, il s'est rendu compte qu'un aliment séché pouvait se conserver plus longtemps. Le principe consiste à enlever de l'eau de l'aliment, l'eau étant un milieu favorable au développement des bactéries. Le séchage a été certainement un des premiers procédés imaginé pour permettre de conserver les aliments", explique Eric Birlouez, spécialiste de l'histoire de l'alimentation.
Pendant des années, la cuisson et le séchage seront les seuls moyens de conservation des aliments jusqu'à l'apparition d'une denrée rare : le sel. Durant cette période, on développe aussi une troisième technique de conservation : le fumage. L'intérêt de cette technique, c'est qu'elle aromatise et colorie l'aliment tout en ayant un effet anti-microbien.
Quelques siècles plus tard, ce sont les fruits que les hommes réussissent enfin à conserver. Le sucre commence à se démocratiser, à être moins précieux et on va utiliser le sucre pour faire des fruits confits, des confitures… Il s'agit alors d'un moyen de conserver les fruits qui sont des denrées périssables.
Mais il faut attendre le XIXe siècle pour voir apparaître deux nouvelles techniques qui vont révolutionner la conservation des aliments. Une de ces techniques est la pasteurisation du nom de Louis Pasteur, la technique consiste à chauffer à 70 degrés un liquide puis le refroidir rapidement. L'action détruit les bactéries. L'autre technique est l'appertisation mise au point par le Français Nicolas Appert. "En 1794, on a l'idée de mettre dans des bocaux de verre et des bouteilles de verre, bien hermétiques, des aliments (légumes, fruits, poisson, viande…) et de les porter à une température élevée, de les mettre pendant plusieurs minutes dans une eau bouillante… et sans comprendre ce qui se passe, Nicolas Appert observe que ces aliments restent consommables des jours, des semaines. Et quinze ans après, on invente la boîte en fer blanc qui est le contenant de nos conserves actuelles", raconte Eric Birlouez.
Enfin au XXe siècle, l'industrie crée un appareil que l'on retrouve désormais dans toutes les cuisines : le réfrigérateur, qui intègre vraiment les foyers français à partir des années 1950. Dernière grande étape, l'arrivée du congélateur dans les années 70. Mais aujourd'hui, c'est le goût et les qualités nutritionnelles que les industriels tentent de garder le plus longtemps.
Des emballages actifs et intelligents pour une meilleure conservation
Conserver plus pour jeter moins, le tout sans produit chimique… Plus qu'un voeu pieu, une réalité ! À l'Institut National de la Recherche Agronomique de Montpellier (INRA), des chercheurs mettent au point ce qu'on appelle les emballages intelligents.
Produits frais ou plats préparés, les emballages alimentaires sont partout dans les rayons des supermarchés. Ce qu'on ne sait pas toujours, c'est que derrière ce qu'on croit être un simple plastique, se cache en fait des produits très innovants. Des emballages que l'on dit actifs ou intelligents. Et pour cause, ils absorbent ou émettent des substances afin de préserver les aliments.
Actuellement ces nouveaux emballages sont en cours d'évaluation. Et les résultats sont sans appel. Avec les emballages classiques, les produits se conservent moins bien qu'avec des emballages actifs. "Le film actif ne libère aucune substance tant qu'il n'est pas au contact de l'humidité qui est libérée par le produit. Dès que l'on ferme la barquette, l'humidité du produit va donc interagir avec le film et permettre la libération de la substance active. Et cela va freiner le développement des moisissures", explique Nathalie Gontard, directrice de recherche à l'Inra.
Moins de moisissures donc, mais cet emballage préserve aussi le goût, la couleur et la texture du produit. Ce film alimentaire pourrait être révolutionnaire. Actuellement en France, 60% des fruits et légumes produits sont jetés sans avoir été consommés.
Jus pressés à froid : une conservation plus longue
"Conservé par haute pression à froid", vous avez peut-être déjà lu cette mention sur vos bouteilles de jus de fruits. Mais savez-vous exactement ce que cela signifie ?
Les jus de fruits crus 100% naturels riches en nutriments et vitamines ont la cote. Leur fabrication exige une vigilance particulière. Après avoir été soigneusement pelés et nettoyés, les fruits et légumes sont envoyés au pressage. Une machine extrait le jus à froid et rejette les déchets. Puis, le jus est mis en bouteille. Une étape délicate car le produit traverse différents tuyaux et récipients.
Une fois les bouteilles fermées, il reste une étape essentielle. Pour ne pas chauffer le jus, les bouteilles sont plongées dans l'eau et soumises à une très forte pression, ce qui permet de détruire les bactéries et de stabiliser le produit. Grâce à cette technique, les bouteilles ont une date limite de consommation beaucoup plus longue. Pourtant, aucun additif ni conservateur n'est ajouté.
À ce jour, seule une poignée de fabricants français ont fait ce choix. Car cette technologie coûte cher. Comptez environ 30% de plus qu'une bouteille de jus de fruits classique.