Il ne fait pas bon être épileptique en Sierra Leone
L'épilepsie peut faire peur, mais en Afrique, faute d'informations, cette pathologie neurologique est perçue comme une véritable malédiction. Les crises, comme des manifestations diaboliques. Les malades se retrouvent ainsi isolés, renvoyés aux médecins traditionnels qui leur prodiguent de drôles de traitements dans l'espoir de les "purifier".
En Sierra Leone, comme le décrit l'agence d'information IPS-Africa, les femmes qui souffrent d'épilepsie sont rejetées. C'est le cas d'Elizabeth, employée dans la fonction publique et enceinte de huit mois, lorsqu'elle fait sa première crise. Elle perd son bébé, son emploi, sa famille et ses amis.
"Quand j'ai fait ma première crise, les gens ont eu tellement peur de moi, qu'ils sont partis en courant. Je me souviens encore, avant que je perde connaissance ils criaient 'Ne la touchez pas ! Ne la touchez pas !' Ensuite, je ne me souviens de rien, si ce ne sont les cicatrices sur mon visage dues à ma chute", raconte Elizabeth.
Le manque d'information sur la maladie et les traitements possibles poussent aux croyances les plus farfelues. Car c'est le diable qu'il faut chasser. En désespoir de cause, Elizabeth a donc consulté un guérisseur. Celui-ci s'est contenté d'une tempête de paroles pour éloigner, lui a-t-il dit, le démon qui était en elle. Aucun soin ne lui a été prodigué.
Pour Max Bangura, le fondateur de l'Epilepsy Association of Sierra Leone (EASL) l'histoire d'Elizabeth est tristement banale... "La croyance répandue que l'épilepsie est contagieuse, isole encore plus les malades. Ceux qui ont pu aller vers les centres médicaux ont été renvoyés à des guérisseurs traditionnels car le personnel médical lui-même est mal informé sur la question. Une jeune femme a même été forcée de boire deux litres de kérosène par un tradipraticien qui prétendait qu'elle allait pouvoir se purifier ainsi", explique-t-il.
La jeune femme fait partie des 60 000 à 100 000 personnes touchées par la maladie en Afrique de l'Ouest, selon les chiffres de l'association, sur les six millions d'habitants que compte cette sous-région. Et sur cette centaine de milliers de personnes, seules 2 500 suivent un traitement médical.
L'association de Max Bangura sillonne le pays pour informer les populations et aider les jeunes femmes, victimes les plus nombreuses de cette pathologie, à sortir de l'isolement et à se faire soigner. Seul problème, le traitement est trop cher pour les maigres ressources de ces Sierra-Léonnaises, obligées de dépenser plus d'un euro par mois pour une boîte de médicaments, alors que 75 % de la population vit avec à peine plus d'un euro par jour.
Source : "SIERRA LEONE: The Isolation of Epilepsy Sufferers", IPS Africa, 23 décembre 2011.
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