La machine au service (du cerveau) de l'homme ?
Interpréter les signaux émis par le cerveau et les traduire en commandes utilisables par l'homme est une piste majeure de la recherche. Les interfaces cerveau-machine sont un espoir immense pour les malades privés de capacités sensorielles. Une équipe de chercheurs français vient de répondre en partie à leurs attentes, mais aussi à celles d'autres malades grâce à une technologie révolutionnaire.
Comment placer des capteurs assez puissants dans le cerveau sans l'endommager ? C'est à cet obstacle, à la fois simple et difficilement surmontable, que se heurtent les chercheurs du monde entier. Ces capteurs existent, mais ils provoquent parfois des infections et surtout, leur puissance est limitée.
Une équipe de chercheurs stéphanois et marseillais, dirigée par Christophe Bernard, de l'Inserm, a mis au point une puce 100% biocompatible qui permet de mesurer l'activité du cerveau. "C'est comme passer par une définition d'image de 1000 pixels à un milliard d'un seul coup", explique Christophe Bernard.
L'équipe de chercheurs, associée à l'Ecole des mines de Saint-Etienne, a réalisé une prouesse en mettant au point une membrane organique fine comme du papier cellophane et très résistante. Ce tissu "intelligent" comporte une puce organique qui amplifie le signal émis par la zone du cerveau où elle est implantée. L'avancée majeure de ce matériel réside dans l'importance de cette amplification qui multiplie par 10 le signal émis.
Rendre la vue à des malvoyants
Christophe Bernard évoque les applications possible dans un court laps de temps. "Les applications vont d'abord concerner la neurochirurgie. Aujourd'hui, quand on opère le cerveau pour une tumeur, par exemple, il faut d'abord faire une cartographie fonctionnelle. On met une grille d'électrodes, le patient est éveillé et on lui pose des questions pour repérer les zones lésées. Notre matériaux, 100% organique, plus souple, plus fin et beaucoup plus sensible, pourait améliorer le travail des équipes médicales. On a des performances incroyables et à moindre coût !"
On pense aussi évidemment à tous les patients paralysés qui pourraient ainsi commander à distance des membres robotiques (un bras par exemple) qui accomplirait les gestes de leur pensée augmentée grâce à cette puce.
Désormais, il faudra obtenir pour cette puce, fabriquée en France, les validations sanitaires et réglementaires pour entrer dans les blocs opératoires.
En attendant, l'équipe de Christophe Bernard et celle du département de bioélectronique de l'Ecole des mines de Saint-Etienne travaillent déjà à l'étape suivante. Rentrer avec cette puce dans le cerveau, pour y capter non plus seulement des signaux, mais des signaux moléculaires, comme le signal du glucose, par exemple. Puis, de délivrer des médicament dans certaines zones très localisées, alors qu'aujourd'hui, les traitements touchent à la fois les zones saines et les zones malades.
Le travail de ces pionniers de la recherche est d'autant plus passionnant que le cerveau reste l'organe le plus mystérieux du corps humain.
Etude de référence : "In vivo recordings of brain activity using organic transistors", Nature Communications, 12 mars 2013, doi:10.1038/ncomms2573
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