Procès PIP : où en est-on ?
Le procès pénal de l'affaire des prothèses mammaires de la marque Poly Implant Prothese (PIP) s'est ouvert mercredi 17 avril 2013, à Marseille. Des dirigeants de la société PIP comparaissaient pour des faits de tromperie et d'escroquerie devant le tribunal correctionnel. Ils sont accusés d'avoir rempli des prothèses mammaires d'un gel de silicone industriel non autorisé. L'indemnisation des prévenus reste incertaine en raison de leur insolvabilité.
Dans les premiers jours du procès, les avocats ont fait valoir la nullité du dossier. Ils ont aussi demandé un examen à la Cour de cassation de deux questions prioritaires de constitutionnalité. Mais, la présidente du tribunal correctionnel a écarté ces requêtes, qu'elle jugeait "dépourvues de caractère sérieux“.
Au cours des premières auditions, Jean-Claude Mas, fondateur de la société PIP qui comparait pour "tromperie et escroquerie", défend son gel “maison“, suscitant l'indignation des plaignantes présentes au procès. “Je prétends que je n’ai pas fait prendre de risques“, lance-t-il dans la salle d'audience. Jean-Claude Mas s'estimait compétent pour proposer son gel bon marché qui a permis à la PME un gain annuel d'un million d'euros.
Le rôle de l'Ansm ouvre un nouveau volet de l'affaire
A l'ouverture du cinquième jour du procès, mardi 23 avril 2013, le tribunal pointait du doigt les négligences de l'Agence des produits de santé. Pourtant, c’est cette dernière qui a découvert la fraude lors d'une inspection de l'usine varoise en 2010, suite à une alerte émise par des chirurgiens sur des taux de rupture anormaux des implants. Ces derniers avaient été retirés du marché immédiatement après la découverte de la fraude.
Jean-Claude Ghislain, directeur d'évaluation des dispositifs médicaux à l'Ansm jusqu’à fin 2012, explique que la procédure d’évaluation des dispositifs médicaux (dont les prothèses mammaires) est différente de celle des médicaments. Les autorités publiques n'interviennent pas dans le processus de mise sur le marché des dispositifs médicaux. Le marquage CE est délivré par un certificateur choisi par l'entreprise (la société TÜV dans l'affaire PIP). "Ce système réglementaire (en matière de dispositifs médicaux) a des limites", ajoute-t-il.
L'Agence avait pourtant déjà reçu 34 signalements, en 2008. Mais selon Jean-Claude Ghislain, les chirurgiens n'ont pas été alarmistes. Il regrette, ainsi, le peu d'incidents déclarés.
Une fraude bien organisée
La société PIP fournissait de faux documents à la société du certificateur allemand TÜV au cours de leurs visites annuelles. Le responsable informatique de la société PIP, Hervé Dessoliers, raconte qu'il supprimait le nom des fournisseurs indésirables sur les documents.
L'autre témoin de l'affaire, Vincent Poirier, technicien affecté à la salle de production, précise qu'aux visites de TÜV, “tous les flûts de remplissage non certifié disparaissaient“. “C'était entré dans les moeurs pour tout le monde“, a-t-il ajouté.
L'indemnisation des victimes de plus en plus incertaine
Les parties civiles ont commencé leurs plaidoiries lundi 29 avril. Une quarantaine d'avocats doivent défendre, devant le tribunal correctionnel, les victimes de la fraude aux implants mammaires dont le nombre dépasse, aujourd'hui, 6.000 femmes.
L'avocate Christine Ravaz, qui représente sept victimes, réclame une indemnisation à hauteur de un million d'euros pour chacune de ses clientes.
Selon l'avocate, c'est l'entreprise PIP qui est responsable "des faits dommageables". Or, cette dernière est en liquidation judiciaire depuis mars 2010 et les prévenus sont insolvables.
La compensation du préjudice moral et physique des victimes semble clairement contrainte par la capacité de paiement des prévenus.
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