Vol le plus long de l’histoire : quels risques pour la santé ?
Un vol expérimental de 19h a eu lieu entre New-York et Sydney. Une durée qui expose à un dérèglement du cycle veille-sommeil et à un risque pour la santé vasculaire des personnes à bord.
19 heures d'avion sans escale. Le plus long vol de l'histoire a atterri le 20 octobre au matin à Sydney depuis son départ de New York. Une prouesse que la compagnie Qantas envisage de traduire prochainement en succès commercial. Mais une telle durée dans les airs ne serait pas sans risque pour la santé des passagers et de l’équipage.
Fatigue et décalage horaire
Le vol expérimental a voyagé pendant exactement 19 heures et 16 minutes, premier de trois vols au très long cours prévus par la compagnie australienne cette année. Celle-ci envisage de créer des lignes commerciales régulières sur ces longs trajets.
Mais si la technique permet d’envisager ces vols, un enjeu de taille reste à étudier : celui de la santé des personnes à bords. "Nous pourrons voir quelles recommandations nous pouvons faire par rapport à la manière pour les pilotes de gérer leur fatigue, et pour les passagers de gérer le décalage horaire", a ainsi déclaré Alan Joyce, le PDG de la compagnie Qantas après l'atterrissage à Sydney.
Les montres réglées sur l’heure d’arrivée
Pour cela, des chercheurs de deux universités australiennes étaient à bord afin d’observer la façon dont les passagers ont dormi et se sont alimentés, et surveiller leur niveau de mélatonine, "l'hormone du sommeil".
A l'issue de l'embarquement, les passagers ont été invités à régler leur montre à l'heure de Sydney. Ils ont ensuite été tenus éveillés jusqu'à la tombée de la nuit sur la partie orientale de l'Australie. Pour cela, des exercices physiques leur ont été proposés, de la caféine et des repas épicés ont été servis dans une cabine éclairée.
Ajuster les horaires de nourriture, d’exercices et d’éclairage
Six heures plus tard, ils ont eu droit à un repas riche en glucides avant d'être invités à ne plus regarder d'écrans. Les lumières ont ensuite été tamisées afin de favoriser leur endormissement.
Marie Carroll, une chercheuse de l'Université de Sydney qui a mené cette expérience, a expliqué à l'AFP s'attendre à ce que cette méthode innovante contribue à réduire les conséquences du décalage horaire. "Je m'attends à ce qu'ils aient une journée normale aujourd'hui et une nuit de sommeil normale ce soir ", a-t-elle déclaré à l’arrivée du vol, affirmant se sentir "étonnamment bien" compte-tenu de la durée du vol.
"C'est une expérience qui a pour objectif de voir si les compagnies aériennes peuvent ajuster les horaires de nourriture, de boissons, d'exercices et d'éclairage pour être en phase avec l'horaire à destination", a-t-elle précisé.
Un risque de thrombose dès six heures de vol
Autre problème posé par ce très long vol : celui de la circulation sanguine. "On considère déjà qu’un vol comporte un risque vasculaire important à partir du moment où il dure plus de six heures" nous explique le docteur Ariel Toledano, phlébologue et médecin vasculaire.
Le principal danger est celui de développer une thrombose veineuse voire une embolie pulmonaire. "Bien sûr, les risques sont majorés chez les patients qui ont déjà fait une thrombose et la prévention devra donc être accrue chez ces personnes lorsqu’elles voyagent en avion" prévient-il.
Cette prévention consiste tout d’abord en "des mouvements qui permettent d’améliorer la circulation au niveau des jambes : rotation des chevilles et flexion-extension des pieds par exemple" cite le médecin. Par ailleurs, "la baisse de la teneur ambiante en oxygène occasionne une hypercoagulation du sang qui risque d’être aggravée par une déshydratation due à la pressurisation de la cabine". Un phénomène à compenser "en se levant régulièrement – au minimum toutes les deux heures – et en buvant suffisamment d’eau tout au long du vol" avertit le docteur Toledano. Dernier conseil, valable pour tous les passagers : celui de porter des chaussettes, des bas ou des collants de contention.
Un temps de repos insuffisant pour les pilotes ?
Quant aux quatre pilotes présents à bord du vol expérimental New-York – Sydney, ils avaient été équipés d'appareils mesurant leurs ondes cérébrales et leur vigilance.
Toutefois, l'Australian and International Pilots Association (AIPA), syndicat qui représente les pilotes de Qantas, s'est inquiétée de savoir si le temps de repos des pilotes, au cours de ce vol, a été d'une qualité suffisante pour que leurs performances demeurent optimales. Elle a demandé une "étude scientifique à long terme" sur l'impact de ces vols sur les équipages.
Le plus long trajet aérien commercial au monde est actuellement une liaison entre New York et Singapour lancée en 2018 par Singapour Airlines, qui dure 18h30 selon le site de la compagnie.