Cancer colorectal : pourquoi la malbouffe est un facteur de risque
Une étude américaine confirme le rôle de la malbouffe dans le développement du cancer colorectal. Les chercheurs ont tenté de comprendre les mécanismes de ce lien.
Avec plus de 43 000 cas recensés en 2018, le cancer colorectal fait partie
des cancers les plus fréquents en France. C'est la deuxième cause de décès par cancer en France.
Il est favorisé par certains facteurs de risque évitables comme la consommation d'alcool, la sédentarité, le surpoids et l'obésité, l'alimentation pauvre en fibres et riche en viande rouge ou transformée.
Une alimentation trop grasse, trop salée
Une étude américaine, publiée en juin 2022 dans la revue
Gastroenterology, explore le lien entre le régime alimentaire des Américains et le cancer colorectal.
Les auteurs ont analysé des données issues de deux grandes études nationales : la Nurses'health Study, incluant 121 700 femmes et la Health Professionals follow-up study, menée sur 51 529 hommes.
Les participants ont été suivis pendant plus de 30 ans sur le plan à la fois médical et alimentaire.
Les chercheurs ont conclu que la malbouffe, une alimentation trop grasse, trop salée et pauvre en nutriments, favoriserait le développement de tumeurs à cause de son effet sur le microbiote.
Ils ont trouvé une corrélation entre les tumeurs avec un fort niveau d'une bactérie, appelée "pks+ Escherichia Coli", et une alimentation riche en viande rouge et transformée, ainsi qu'en calorie vide (des aliments riches en calories mais pauvres en nutriments).
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Escherichia Coli en cause ?
Escherichia Coli est une bactérie habituellement présente dans l'intestin et inoffensive la plupart du temps. Mais certaines souches de bactérie comportent des gènes appelés polyketide synthétase, ou pks.
Ces souches "pks Escherichia Coli" produiraient dans les intestins de la colibactine, une substance toxique, qui endommagerait l'ADN des cellules et favoriserait les mutations. Elles stimuleraient par ce biais la croissance du cancer colorectal.
Plusieurs limites à l'étude
Les auteurs de l'étude reconnaissent que d'autres travaux
doivent confirmer leur hypothèse et se pencher sur d'autres
ethnies. Les travaux portaient en effet sur une population caucasienne, non hispanique.
Ils ont également identifié des spécificités en fonction du genre, sans comprendre leurs mécanismes.
"Le microbiote est le truc à la mode depuis une dizaine
d'année", critique le Pr Taïeb. "Il est impliqué dans la maladie d'Alzheimer, le cancer, la schizophrénie mais on ne sait pas où est la poule et où est
l'œuf ! On ne sait pas si le microbiote est la cause ou la conséquence du cancer ou d'un tierce facteur, comme nos consommations alimentaires."
Si l'auteur de l'étude estime qu'elle pourrait démontrer comment nos choix alimentaires pourront, à l'avenir, réduire le risque de cancer colorectal, le Pr Taïeb est plus circonspect.
"Ce type d'étude donne des pistes pour mieux comprendre
les mécanismes de formation du cancerogénèse (NDLR : formation du cancer), et
peut-être les moyens de mieux les contrôler. Mais faire
la preuve qu'on peut prévenir un cancer colorectal en modifiant son
alimentation ou le microbiote est trop difficile en pratique" modère le spécialiste.