De la stimulation cérébrale profonde pour traiter les TOC
Quand les tocs sont résistants aux traitements, les patients peuvent bénéficier d’un traitement chirurgical. Il s’agit d’implanter des électrodes qui vont permettre une stimulation cérébrale profonde.
"J’ai passé des nuits entières à refaire ce geste. Pour moi je n'arrivais pas à le faire parfaitement, mon toc me disait non, là, tu l’as pas bien fait, tu continues, tu continues, il faut le faire parfaitement… Je me rappelle des nuits où j’allais me coucher à 23h et à 6h du matin j’étais encore en train de le faire", explique Emilie, 20 ans.
Emilie a 20 ans et souffre de troubles obsessionnels compulsifs depuis son enfance. Elle a mis en place des rituels pour chasser de son esprit des pensées qui l’obsèdent, comme le suicide.
"J’avais peur en fait du suicide. Dès que j’avais une pensée de moi en train de me donner la mort, je devais refaire ce que je faisais sans la pensée en fait", commente Emilie.
Un phénomène qui génère une grande anxiété
A l’adolescence, ces tocs ont de graves conséquences sur sa vie.
"Je n'avais pas des bonnes notes... Je pense que j’avais sûrement les capacités mais mon cerveau était déjà beaucoup trop occupé à faire d’autres choses. Les gens me voyaient, je me suis beaucoup fait insulter, on m’appelait la H handicapée", confie Emilie.
Emilie essaie toutes sortes de traitements qui ne lui conviennent pas, thérapies, médicaments ou encore de l'hypnose. Son médecin lui propose la stimulation cérébrale profonde. Elle nécessite une intervention chirurgicale.
"Dans les troubles obsessionnels compulsifs, on a repéré un circuit qui implique différentes structures du cerveau. En particulier le noyau subthalamique", explique le Pr Stéphane Palfi, neurochirurgien à l'hôpital Henri Mondor.
Cibler les circuits cérébraux des TOC
C’est dans cette zone qu'il va être introduit deux électrodes. Le but est de stimuler, par des impulsions électriques répétées, la région du cerveau impliquée dans les TOC.
Cette intervention nécessite une grande précision. La trajectoire a donc été calculée en amont à l'aide de l’imagerie médicale.
"On repère le point d’entrée sur le crâne, on a vraiment calculé la trajectoire, du point d’entrée cortical jusqu’à l’arrivée dans le noyau subthalamique", explique le Pr Stéphane Palfi.
Le chirurgien doit d’abord se frayer un passage à travers la boite crânienne pour accéder au cerveau.
"Je coagule légèrement la dure-mère pour l’ouvrir et accéder au cortex cérébral pour pouvoir après introduire l’électrode d’enregistrement", commente le Pr Stéphane Palfi.
Cette électrode va permettre d’enregistrer l’activité électrique du cerveau. Le noyau subthalamique a une signature bien à lui et le neurochirurgien peut la lire sur cet écran.
Maintenant qu’il sait qu’il est au bon endroit, le chirurgien peut introduire l’électrode de stimulation.
"Maintenant on introduit l’électrode en faisant attention à la direction. On le fait très doucement pour écarter les vaisseaux, pour écarter les fibres, pour ne pas que ce soit lésionnel du tout, le moins possible. Là elle est en place", explique le Pr Stéphane Palfi.
Après avoir introduit la 2e électrode, leur bon positionnement est contrôlé grâce à un scanner.
Une technique encore expérimentale
"Nous voyons que les deux électrodes sont très bien placées au niveau des noyaux subthalamiques. On est satisfait. L’emplacement est très bien au mm près. On ne sait pas exactement le mécanisme electrophysiologique ou physiologique qui est à l’origine des bénéfices observés chez les patients... On a l’impression qu’on rétablit le fonctionnement de tout un circuit qui passe par le système limbique et qui passe donc dans le système de prise de décision", explique le Pr Stéphane Palfi.
Dans un deuxième temps, une pile sera implantée au niveau de l’abdomen. Reliée aux électrodes au moyen d’un câble sous la peau, elle permettra de générer des impulsions électriques pour stimuler la zone cérébrale concernée.
En France, cette stimulation cérébrale profonde pour les TOC n’est réalisée que dans le cadre d’essais thérapeutiques.