Des éjaculations fréquentes protègent-elles vraiment du cancer de la prostate ?
Plusieurs études vont dans le sens de ce constat, mais existe-t-il vraiment un lien entre une forte activité sexuelle et un risque réduit de cancer de la prostate ?
Les pouvoirs insoupçonnés de l’éjaculation ? Depuis plusieurs années, différentes études signalent une relation entre une forte activité sexuelle et un risque moindre de développer un cancer de la prostate chez l’homme, et ce, à n’importe quel âge. En 2017, une équipe de chercheurs américains avait déjà suivi 31 925 hommes pendant 18 ans au Royaume-Uni, pour tenter de déterminer les liens potentiels entre éjaculation et cancer de la prostate.
Plus de 20 éjaculations par mois
Leurs résultats, publiés dans la revue European Urology, avaient mis en avant que les 4 000 hommes du panel ayant développé un cancer de la prostate éjaculaient beaucoup moins régulièrement que les autres. Lors de la publication de cette étude, le Pr François Desgrandchamps, chirurgien urologue, nous expliquait en analysant les résultats de l’étude que si un homme éjaculait "plus de 20 fois par mois", le risque de développer un cancer de la prostate baissait "d'environ un tiers".
Plus récemment, une revue de cas publiée dans Clinical Genitourinary Cancer de toutes les recherches médicales pertinentes menées au cours des 33 dernières années sur le sujet a mis en exergue que sept études sur 11 ont révélé un effet bénéfique d’une éjaculation plus fréquente sur le risque de cancer de la prostate.
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Pourquoi l'éjaculation réduit le risque de cancer ?
Dans The Conversation, le chercheur britannique Daniel Kelly donne quelques pistes pour expliquer ce lien de cause à effet. Selon lui, l’éjaculation provoque une modification bénéfique de la réponse immunitaire de la prostate, ce qui permet de réduire l’inflammation de cette glande, un facteur de risque connu de développement du cancer. Elle permettrait aussi d'augmenter la défense immunitaire contre les cellules tumorales de la prostate.
Il pointe également une autre origine d’apparition plus probable du cancer : la baisse de la tension psychologique. En effet, l’éjaculation peut réduire l'activité du système nerveux, ce qui empêche certaines cellules de la prostate de se diviser trop rapidement, un mécanisme qui augmente le risque qu’elles deviennent cancéreuses.
Des études supplémentaires nécessaires
Plusieurs biais statistiques à ces études existent. Par exemple, la majorité de celles-ci repose sur des auto-évaluations sur plusieurs années, voire sur des décennies. "Il s’agit donc au mieux d’une estimation, qui peut être biaisée par les attitudes, tant personnelles que sociétales, à l’égard de l’activité sexuelle et de la masturbation, ce qui peut conduire à une auto-déclaration exagérée ou à une sous-déclaration", admet Daniel Kelly dans The Conversation.
D’autres facteurs, liés de près ou de loin avec l’éjaculation, peuvent également expliquer cette baisse du risque de développer un cancer de la prostate. Par exemple, les hommes qui éjaculent fréquemment et ont une vie sexuelle épanouie ont, en règle générale, un mode de vie plus sain et sont donc moins sujets à voir apparaître un cancer.
Ces études, aussi alléchantes sur le papier soient-elles, ne doivent donc pas détourner les hommes d’un facteur essentiel pour limiter les risques du cancer de la prostate : le dépistage. En cas d'antécédents familiaux ou d'apparition de symptômes, comme des fuites urinaires, des infections urinaires, des difficultés à uriner, à avoir une érection ou à éjaculer, n'hésitez pas à consulter votre médecin généraliste. Il pourra établir un diagnostic grâce à un toucher rectal indolore.