L'hyperactivité surdiagnostiquée et surtraitée ?
Une définition trop étendue de "l'hyperactivité" et des "troubles déficitaires de l'attention" risque de conduire à un surdiagnostic et un surtraitement chez les enfants, selon des experts australiens et néérlandais qui publient leur analyse, le 5 novembre 2013, dans la revue médicale British Medical Journal (BMJ). Les traitements existants possèdent malheureusement de nombreux effets secondaires.
La mise en garde des experts intervient alors que le nombre de patients traités pour une hyperactivité a très fortement augmenté ces dernières années dans de nombreux pays occidentaux.
Selon les auteurs de l'article, leur nombre a doublé chez les enfants et quadruplé chez les adolescents au Royaume-Uni entre 2003 et 2008. Il a également doublé aux Pays-Bas sur quatre ans (entre 2003 et 2007), et augmenté de 73% en Australie en onze ans (de 2000 et 2011).
Un traitement sous surveillance
Le principal traitement est le méthylphénidate (Ritaline®, Concerta®, Quasym®…), un psychostimulant dont la structure chimique est apparentée à celle de l'amphétamine.
Ses "bénéfices à long terme restent mal connus", relèvent les auteurs de l'article. En revanche, ils observent que la molécule peut avoir un effet toxique sur le foie et engendrer des pensées suicidaires ou de l'anorexie. Le médicament possède de fait un effet coupe-faim. A court terme, il peut d'ailleurs "provoquer des retards de croissance" au moment de la puberté. La molécule influe également sur le rythme cardiaque (en France, sa prescription est ainsi contre-indiqué en cas de troubles cardiovasculaires et cérébrovasculaires). Des risques d'addiction sont en outre suspectés depuis peu (1).
Des cas plus ou moins sévères
Pourtant, peu de patients souffrant d'un trouble déficitaires de l'attention avec hyperactivité (ou TDAH) présentent une forme "sévère" de ce trouble (moins de 14% des cas de TDAH aux Etats-Unis, voir encadré).
La définition de la TDAH a évolué ces dernières années, incluant un nombre de plus en plus important de cas. "Ces changements sont préoccupants parce qu'ils augmentent le risque de confondre des cas de TDAH avec des processus de développement normaux, tels que l'agitation ou un manque de concentration dus à la puberté", relèvent les auteurs.
Des traitements encore peu prescrits en France
En France, l'usage du méthylphénidate reste encore "limité" (42.023 patients traités en 2011), selon l'Agence du médicament (ANSM). L'ANSM reconnaissait en juillet 2013 que l'utilisation de la molécule, qui était "confidentielle" jusqu'en 2004, est depuis, "en constante croissance", avec une hausse de 71% du nombre des utilisateurs entre 2005 et 2011, et une poussée de 133% des ventes de doses journalières sur la même période.
L’agence note toutefois que le nombre des personnes traitées reste modeste au regard de l'estimation en France du nombre d'enfants qui seraient atteints de TDAH (estimé entre 190.000 et 480.000, soit de 2 à 7% des enfants en âge scolaire, selon les études mises en avant par l’ANSM).
La prescription initiale de cette molécule, indiquée pour les enfants de plus de 6 ans souffrant de TDAH, est réservée aux seuls spécialistes et services hospitaliers. Un usage détourné a été noté chez des jeunes, en particulier des "étudiants dans un but de performance intellectuelle", indique le rapport.
(1) Une étude publiée le 5 novembre 2013 dans la revue scientifique Nature Communications révèle de surcroit que le méthylphénidate entraîne un risque de dépendance important chez le rat. L’administration de la molécule augmente en effet chez le rongeur l'activité de la dopamine, un neurotransmetteur directement impliqué dans les comportements addictifs. Chez l'homme, aucun phénomène d'accoutumance ou de dépendance n'a toutefois été mis en lumière au cours des études menées depuis une quinzaine d'années auprès des enfants traités pour TDAH.
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Aux Etats-Unis, 11% des enfants en âge d’aller à l’école sont diagnostiqués pour un TDAH, selon des statistiques fédérales rendues publiques en avril dernier par le New York Times. En 2010, 87% des enfants diagnostiqués ont été traités par des psychostimulants comme la Ritaline® ou l'Adderall® (un médicament de type amphétamine).