Laits infantiles contaminés : Modilac, le "nouveau Lactalis" ?
Vingt-six nourrissons ayant consommé des produits de cette marque ont été atteints d'une salmonellose entre août 2018 et janvier 2019. Douze ont été hospitalisés.
"C'est une affaire Lactalis bis", dénonce Quentin Guillemain, président de l'association créée après le scandale de la contamination par des salmonelles de laits infantiles produits par cette marque, l'AFVLCS. "Les similitudes sont incroyables. Cela montre que c'est un problème systémique, et pas celui d'une seule marque", déclare-t-il à l'AFP après les dernières informations apportées par Santé Publique France sur le nombre d'enfants touchés par une salmonellose cette fois provoquée par des laits de la marque Modilac.
"26 bébés, âgés de 2 mois à 2 ans au moment des symptômes, ont présenté de la diarrhée dont treize avec du sang dans les selles", décrit l'agence de veille sanitaire dans un point publié le 19 février. "Vingt-cinq ont eu de la fièvre. Douze bébés ont été hospitalisés pour leur salmonellose et sont sortis depuis. Tous les enfants vont mieux ou sont guéris". Les 4 premiers cas identifiés fin janvier avaient déjà provoqué le 24 janvier le rappel par la société Sodilac de 400.000 boîtes de produits infantiles à base de protéines de riz de marque Modilac. Car ces aliments étaient le point commun entre ces 4 enfants, infectés par exactement la même salmonelle.
Dans cette famille de bactéries qui peuvent être graves chez les nourrissons, celle qui est incriminée ici est la Salmonella Poona, identifiée depuis chez près de 30 enfants. Selon Santé Publique France, "les investigations auprès de leurs parents mettent en évidence la consommation, dans les jours précédant les symptômes, de laits en poudre de marque Modilac produits par une même usine en Espagne : Modilac expert Riz 1er âge ; Modilac Riz 2ème âge et Modilac Riz 2ème âge Anti Régurgitation. Les 26 bébés ne partageaient pas d’autre aliment ou boisson en commun. Les biberons étaient préparés avec de l'eau embouteillée de sept marques différentes".
Lactalis a aussi rappelé des boîtes de lait de la marque Picot AR
Ces résultats confirment les suspicions nées des 4 premiers cas. Sodilac avait donc déjà lancé l'alerte sur tous les lots fabriqué par cette usine espagnole. Plus discrètement, Lactalis avait aussi rappelé "par précaution" 16.300 boîtes de lait de la marque Picot AR vendues exclusivement en pharmacie depuis le 29 novembre 2018. Car elles avaient été produites dans la même usine et au même moment que les lots "Modilac" contaminés par la Salmonella Poona !
D'où la colère de Quentin Guillemain, de l'association des Familles Victimes du Lait Contaminé aux Salmonelles (AFVLCS) qui considère que "la réglementation européenne n'est pas suffisante. Tant que rien ne sera fait sur la production et le contrôle des laits infantiles, nous aurons d'autres affaires du même type", a-t-il prédit à l'AFP. Selon l'avocate de cette association, Jade Dousselin, vingt familles vont déposer plainte contre Sodilac pour "blessures involontaires et mise en danger de la vie d'autrui" au pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris.
Vérifiez si vos boîtes ne sont pas dans les lots incriminés
En pratique, Santé Publique France rappelle aux "parents qui disposeraient encore de boîtes de ces lots (de ne...) pas les utiliser, qu'elles soient neuves ou déjà entamées. Ils doivent prendre contact avec leur pédiatre ou leur médecin généraliste pour se voir conseiller ponctuellement un lait de remplacement, notamment pour les bébés allergiques aux protéines de lait. Dans l'attente, ils peuvent se rendre en pharmacie où un lait de substitution leur sera proposé".
Avant ce remplacement, les parents peuvent préparer les biberons avec le lait qu'ils possèdent, en faisant bouillir le lait pendant 2 minutes puis en le laissant refroidir avant de le verser dans le biberon. La Société française de pédiatrie a formulé des recommandations de substitutions, produit par produit, qui ont été transmises aux médecins généralistes, pédiatres, sages-femmes, pharmaciens et toutes les structures concernées comme les PMI et les crèches.
Dans tous les cas, si un enfant présente des symptômes de toxi-infection alimentaire (diarrhée éventuellement accompagnée de fièvre), les parents sont invités à contacter un médecin dans les meilleurs délais. En attendant, un soluté de réhydratation, disponible en pharmacie, pourra être donné à l'enfant pour éviter une déshydratation en raison de nombreuses selles liquides.