Prise d'otages : comment les enfants le vivent ?
Voilà une semaine maintenant qu'est prise en otage une famille de sept Français, enlevés le 19 février 2013, au Cameroun. Aux côtés de leurs parents, se tiennent leurs quatre enfants, âgés de 5 à 12 ans. Nous ne savons rien sur leurs conditions de détention. Il reste que les enfants sont encore moins bien préparés que des adultes à vivre une prise d'otage. Comment vivent-ils ces situations exceptionnelles ? Quelles peuvent être les conséquences psychiques de cette prise d'otage ? Réponses avec le Dr Carole Damiani, psychologue et victimologue à "Paris Aide aux victimes".
La famille de sept Français enlevés au Cameroun le 19 février 2013, apparaît pour la première fois sur une vidéo, aux côtés de leurs ravisseurs, disant appartenir au groupe islamiste nigérian Boko Haram. La famille est entourée d'au moins trois preneurs d'otages, dont les visages sont dissimulés, brandissant armes et munitions. Le père, se tient aux côtés de sa femme, et de leurs quatre enfants âgés de 5 à 12 ans, et demande au nom des ravisseurs, la libération de plusieurs islamistes détenus au Nigéria.
- Comment un enfant de 5 ans peut-il interpréter le fait d'être pris en otage ?
Dr Carole Damiani : "A 5 ans, les enfants ont une appréhension forte de la mort. Mais quand un adulte angoisse sur l'idée de la mort, l'enfant lui, craint davantage l'abandon. D'autant plus si les petits sont séparés de leurs parents. Cela peut laisser des séquelles psychiques importantes. L'idée même de se séparer, de ses amis ou de ses parents, ne fut-ce que temporairement, pourrait engendrer des crises d'angoisse, difficiles à gérer."
- Quels type de relations l'enfant peut-il nouer avec ses ravisseurs ?
Dr Carole Damiani : "C'est tout le problème avec les enfants. Car pour eux, ce que dit un adulte est vrai, et ne peut être réfuté. Si le ravisseur menace, l'enfant y croit. Il est donc aisé de l'asservir. Dans les cas d'enlèvement et de séquestration, on remarque que les ravisseurs sont plein de sollicitude envers leurs petits otages, afin de mieux les amadouer.
"Ils leur font croire que les parents les ont abandonnés, et qu'ils ne reviendront jamais. Le problème, c'est une fois que les enfants sont libérés : il faut déconstruire tout ce que les ravisseurs ont fait croire aux enfants. Certains enfants se mettent à aimer leur bourreau, à regretter même qu'il disparaisse de leur vie. Ce que les parents ont du mal à comprendre. C'est pourquoi là aussi, il y a un long travail à faire ensemble, avec toute la fratrie."
- Dans des situations de prise d'otages, les enfants sont nécessairement confrontés à la violence.
Dr Carole Damiani : "Exposés à la violence, ces enfants se retrouvent quasiment dans la même situation que ceux victimes de maltraitance familiale. Généralement, on retrouve les mêmes symptômes : des enfants anxieux, craintifs, et sur les nerfs.
"Ce qui peut sauver ces enfants pris en otage, ce sont les valeurs et les ressources familiales dans lesquelles ils vont pouvoir puiser pour survivre... Si ma maman était là, elle me dirait qu'il ne faut pas avoir peur, qu'elle va bientôt me retrouver.
"Je pense que cette prise d'otages au Cameroun peut aussi être l'occasion en famille, de rappeler à nos enfants que s'ils se retrouvaient dans une telle situation, ils doivent être certains que leurs parents seront là, à leurs côtés, quelque soit la durée, et quoiqu'on leur dise."
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