L'IVG, un droit menacé ?
Le nom de Simone Veil est indissociable de la loi légalisant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) en France. Véronique Séhier, coprésidente du Planning Familial, était l'invitée du Magazine de la santé ce lundi 3 juillet pour faire le point sur l'accès à l'IVG aujourd'hui.
- Que reste-t-il aujourd'hui du combat de Simone Veil ?
Véronique Sehier, coprésidente du Planning Familial : "Cette loi a permis de légaliser l'avortement pour la première fois en France. Et c'est une histoire de luttes car elle a pu mener ce combat parce que des femmes s'étaient mobilisées avant, depuis longtemps. Simone Veil a mené le combat à l'Assemblée nationale, dans une Assemblée qui n'était franchement pas favorable (…) Cela montre que cette liberté des femmes de pouvoir décider elles-mêmes si elles veulent ou non poursuivre une grossesse, n'est pas évidente pour tout le monde aujourd'hui. Et c'est un droit qui est toujours menacé. On le voit avec ce qui se passe aujourd'hui en Pologne, en Irlande ou encore aux Etats-Unis notamment depuis l'arrivée du nouveau président. Ce droit est toujours un droit à défendre, même s'il est inscrit dans la loi et même s'il a beaucoup évolué depuis la loi Veil."
- Les femmes d'aujourd'hui ont-elles conscience de ce qu'elles doivent à Simone Veil ?
Véronique Sehier : "Je pense que cela fait partie de l'histoire. Mais au planning familial, nous rappelons tous les jours que l'avortement est un droit qu'il faut toujours défendre. C'est un droit à part entière mais comme la loi ne suffit pas, il faut aussi le défendre. On voit bien aujourd'hui que l'accès à l'IVG n'est pas le même partout en France. Selon l'endroit où vous résidez, il existe encore de grandes inégalités territoriales dans l'accès à l'avortement."
- Pour quelles raisons l'accès à l'IVG est-il en danger aujourd'hui ?
Véronique Sehier : "Quand on fait des économies en matière de santé, quand on restructure des services hospitaliers, les services d'avortement ne sont pas du tout les services prioritaires. Dans les études de médecine, parler d'avortement n'est pas encore très répandu. Donc il faut vraiment une démarche volontariste pour vouloir faire des avortements. Il y a une connotation encore très négative de l'avortement pour que ce soit vraiment un droit à part entière. Et subsiste toujours la double clause de conscience par rapport à l'IVG : une clause de conscience spécifique inscrite dans la loi sur l'avortement alors que cette clause de conscience existe pour tout acte médical."
- Quelles sont les nouvelles méthodes des anti-IVG ?
Véronique Sehier : "Les anti-IVG utilisent beaucoup les réseaux sociaux et la désinformation. On fait croire aux femmes que l'avortement a des conséquences néfastes sur leur santé : à travers des sites, des réseaux sociaux, à travers des lignes téléphoniques. On leur explique qu'elles risquent d'être stériles, qu'elles n'auront plus jamais d'autres enfants ensuite, que l'avortement est dangereux pour elles… Ce sont des sites qui se font passer pour presque officiels d'où l'importance de multiplier les lieux d'informations justes et objectives sur un droit. S'il s'agit d'un droit à part entière, c'est à chaque personne de décider. Et comme le disait Simone Veil, les femmes savent décider pour elles-mêmes et elles n'ont pas besoin qu'un compagnon, qu'un médecin ou que n'importe qui d'autres leur disent ce qu'elles doivent faire."