Quels sont les risques pour la santé du "joint" électronique ?
Sur Internet ou dans des boutiques d'e-cigarettes, on peut acheter du liquide contenant du cannabidiol (CBD), une molécule extraite du cannabis. Si la pratique est légale, les effets sur la santé restent flous.
Profitant d'un cadre juridique flou, le "joint" électronique se répand en France, provoquant la colère des médecins. Le ministère de la Santé vient de saisir l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et la répression des fraudes pour mettre en place davantage de contrôles. Mais il admet que la pratique est légale. En France, la détention et la fabrication de cannabis et de ses dérivés sont interdits. Mais la commercialisation de variétés de cannabis, dépourvues de propriétés stupéfiantes comme le cannabidiol (CBD), est autorisée. Les explications du Dr Alice Deschenau, psychiatre-addictologue à l’hôpital Paul Guiraud, à Villejuif.
- Quels sont les effets du cannabidiol (CBD) sur la santé ? Peut-on devenir dépendant ?
Dr A. Deschenau : "Le cannabidiol est une substance qui est dans la plante du cannabis. Celle-ci en contient un certain nombre, ce qui rend complexe l’analyse précise des effets du cannabis. Pour la molécule du cannabidiol, les choses ne sont pas complètement claires. On sait que cette molécule va jouer sur certains récepteurs du système cannabinoïde. Il y en a au niveau du cerveau. On sait qu’il y a peut-être des propriétés anxiolitiques, peut-être anti-psychotiques. Certains effets ont lieu au niveau cérébral. Mais, on ne sait pas encore à partir de quelle dose ou selon quel mode d’administration."
- Par exemple, est-on plus dangereux en voiture après avoir vapoté du cannabidiol ?
Dr A. Deschenau : "C’est une des questions qu’il faut se poser en faisant des tests. Une des problématiques est que, via le vapotage, on a un produit qui est transformé. On sait la quantité qu’il y a dans le liquide du départ. Ce qui est plus compliqué c’est de savoir quelle quantité est inhalée avec la vapeur et quelle quantité en extraient les personnes. On ne vapote pas tous de la même manière. On ne va pas avoir les mêmes taux dans le sang selon les personnes. Il faut donc appeler à la vigilance les personnes qui seraient consommatrices. Il faut plus d’études."
- Ce dispositif est légal. Est-ce que cela vous choque en tant que médecin ?
Dr A. Deschenau : "Parler de joint électronique serait excessif. Pour les usagers, il faut être vigilant à être juste dans notre langage sinon on n’est pas audible. Si on dit que c’est un joint et qu’on crie au danger au même titre qu’au cannabis, les consommateurs vont faire la différence et vont se dire « on veut nous faire peur ». Il faut essayer d’être au plus juste des mots qu’on emploie, de ce qu’on explique... Il faut parler ouvertement de qu’on sait, des risques."
- Certains vendeurs présentent la e-cigarette comme un moyen d'arrêter de fumer. Est-ce que le "e-joint" pourrait permettre d'arrêter de fumer du cannabis ?
Dr A. Deschenau : "Dans le e-joint, on ne retrouve qu’une susbtance du cannabis. On peut imaginer que pour un certain nombre de consommateurs on ne va pas être dans une substitution. Il n’y a notamment pas de THC qui est la substance la plus forte et la plus active. Néanmoins, là aussi, on n’a pas de donnée pour l’instant. Les quelques essais qui ont dû être sur cette thématique n’ont pas abouti à des conclusions."