Fortnite : des avocats canadiens partent en guerre contre le jeu video
Une action collective est déposée au Québec contre Epic Games, le studio de jeux vidéo qui a créé "Fortnite Battle Royale". Il est accusé d’avoir utilisé des tactiques pour créer une forte dépendance chez les joueurs.
Un jeu conçu pour créer l’addiction. C’est en s’appuyant sur cet argument que le cabinet d’avocats québécois Calex a déposé une demande d’action collective contre Epic Games, le studio de jeux vidéo derrière le populaire "Fortnite Battle Royale".
Ce jeu vidéo place une centaine de joueurs sur une île virtuelle, où ils doivent récupérer des armes et de l'équipement pour se défendre contre les autres participants jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'un joueur ou une équipe. Il comptait en mars 2019 plus de 250 millions de joueurs dans le monde.
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Les mêmes tactiques que celles des machines à sous
"On parle d'un jeu qui a été développé par des équipes de psychologues spécialisés pour créer un caractère d'addiction et on reproche à la compagnie de ne pas avoir divulgué tous les risques et dangers inhérents au produit", estime auprès de l'AFP Jean-Philippe Caron, avocat qui pilote ce dossier.
Les créateurs du jeu vidéo le plus populaire du monde "ont utilisé les mêmes tactiques que les créateurs de machines à sous, soit des programmes de récompense variables, pour s'assurer de la dépendance de ses utilisateurs, le cerveau étant manipulé pour toujours désirer davantage", détaille le document de demande d'action collective déposé auprès de la Cour supérieure du Québec.
Le circuit de la récompense s’emballe
Plus précisément, le cabinet d'avocats montréalais argue que les mécanismes du jeu, dont les récompenses, défis et autres objets virtuels vendus contre de l'argent réel, sont conçus pour provoquer l'addiction des joueurs afin qu'ils passent le plus de temps possible devant leur écran et dépensent sans compter. "L'addiction au jeu Fortnite a de réelles conséquences sur la vie des joueurs dont plusieurs ont développé des problèmes tels qu'ils ne mangent pas, ne se douchent pas, et ne socialisent plus", selon le document, qui souligne l'existence de "centres de réhabilitation spécialement dédiés à l’addiction à Fortnite".
Comme pour toutes les addictions, l’addiction au jeu joue sur le circuit cérébral de la récompense. Dans le cas des joueurs pathologiques, ce circuit "s’emballe" et incite de plus à plus à répéter le comportement qui a provoqué la satisfaction. Le jeu devient alors un besoin compulsif provoqué par un dérèglement du circuit qui régule les pulsions.
Une première mondiale
La procédure, engagée par le cabinet montréalais Calex à la demande de parents de mineurs ayant développé un problème de dépendance au jeu, est une première mondiale favorisée par le régime légal spécifique du Québec, selon M. Caron.
Si elle était autorisée par le tribunal, le studio pourrait s'exposer à "plusieurs dizaines, voire des centaines de millions de dollars" en dommages et intérêts, d'après l'avocat.
Impossible selon l'avocat de prévoir quand une décision sera rendue, mais l'autorisation d'intenter une action en justice devrait être validée ou non d'ici un an, et la procédure risque d'être longue.