Perturbateurs endocriniens : le coup de gueule d'une centaine de scientifiques
La Commission européenne doit prochainement produire une réglementation sur les perturbateurs endocriniens. Un texte fort peu contraignant pour les industriels et contre lequel une centaine de chercheurs internationaux s'insurgent.
"Depuis des décennies, la science est la cible d'attaques dès lors que ses découvertes touchent de puissants intérêts commerciaux". C'est ainsi que commence la tribune publiée mardi 29 novembre dans les pages du journal Le Monde. Les signataires de ce texte sont une centaine. Des scientifiques du monde entier qui dénoncent la pression exercée par l'industrie chimique sur la Commission européenne afin de minimiser les dangers liés aux perturbateurs endocriniens.
Une interdiction uniquement si des problèmes se présentent
Les perturbateurs endocriniens, tels que les bisphénols ou les phtalates, interfèrent avec notre système hormonal. On les retrouve dans de nombreux pesticides, solvants et plastiques, mais aussi dans certains cosmétiques ou emballages alimentaires. Leurs effets peuvent être délétères sur la santé, même à de faibles niveaux d'exposition.
D'après nos confrères du Monde, un projet de réglementation de ces produits est actuellement en cours à Bruxelles. Un projet dans lequel une phrase pose problème : "Les perturbateurs endocriniens et leurs effets nocifs devraient être traités comme tout autre produit chimique préoccupant pour la santé humaine ou l'environnement". À première vue, la Commission européenne semble prendre en compte les dangers de ces molécules. Mais la phrase est sournoise. Elle signifie en fait que les produits contenant des perturbateurs endocriniens, s’ils sont traités comme tout autre produit chimique, ne seront pas interdits a priori. Ils ne le seront qu'au cas par cas si des problèmes se présentent après leur mise sur le marché. Une position qui satisfait les industriels mais qui fait bondir le monde de la recherche. S’il a été prouvé que les perturbateurs endocriniens sont nocifs, il peut être long, a posteriori, c’est-à-dire une fois la maladie survenue, de démontrer le lien direct. Mais surtout, le mal causé est irréversible.
Cancer du sein, de l'ovaire, malformations génitales…
"Nous considérons qu'il n'est plus acceptable de nous taire", reprennent les chercheurs signataires de la tribune. Car, comme ils le précisent, "jamais l'humanité n'a été confrontée à un fardeau aussi important de maladies en lien avec le système hormonal". Cancers du sein, du testicule, de l'ovaire ou de la prostate, troubles du développement du cerveau, non-descente des testicules à la naissance, malformations du pénis et détérioration de la qualité du sperme… Ce sont là quelques-unes des pathologies liées au contact de notre organisme avec ces molécules chimiques qui perturbent notre système hormonal. Des produits qui, pour ces spécialistes constituent "une menace mondiale pour la santé".