Coronavirus : deux études réfutent l’efficacité de l’hydroxychloroquine
Une étude française et une autre chinoise montrent que l’hydroxychloroquine n’est pas plus efficace que les soins standard seuls contre le Covid-19. Ce traitement donne en revanche lieu à davantage d’effets secondaires.
Ces deux nouvelles études vont-elles mettre fin au débat sur l’hydroxychloroquine ? L’antipaludéen et son potentiel effet contre le SARS-CoV-2, défendu notamment par le professeur Raoult, divise les scientifiques depuis le début de l’épidémie de coronavirus. Deux articles publiés le 14 mai dans la prestigieuse revue scientifique BMJ apportent aujourd’hui la preuve que ce médicament n’est efficace ni contre les formes légères, ni contre les formes graves de la maladie.
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La même mortalité, avec ou sans hydroxychloroquine
La première de ces études est française. Ses auteurs, affiliés à l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) ont cherché à mesuré l’efficacité du médicament chez des patients hospitalisés pour un coronavirus et qui ont nécessité une oxygénation entre le 12 et le 31 mars 2020.
Leur étude a réuni en tout 181 patients âgés de 18 à 80 ans, présentant un syndrome de détresse respiratoire aiguë. 92 patients ont reçu 600 mg d’hydroxychloroquine par jour et les 89 autres, le groupe contrôle, a reçu les soins standard d’oxygénation sans hydroxychloroquine.
Résultat : la survie globale à 21 jours est similaire dans les deux groupes, avec ou sans traitement à l’hydroxychloroquine (89% dans le groupe qui a reçu le traitement et 91% dans le groupe contrôle). Autrement dit, la mortalité est comparable dans les deux cas, ce qui fait conclure aux auteur de l'étude : "l’hydroxychloroquine a retenu l’attention du monde entier comme traitement potentiel du Covid-19 en raison des résultats positifs de petites études. Cependant, les résultats de cette étude ne soutiennent pas son utilisation chez les patients hospitalisés avec le Covid-19 qui ont besoin d’oxygène".
Ces résultats sont tout de même à prendre avec précaution, puisque le nombre total de participants reste assez faible. De plus, cette étude n’est pas "randomisée", c’est-à-dire que la répartition des patients dans chacun des deux groupes n’a pas été laissée au hasard.
Pas d'efficacité antivirale
Mais la conclusion de cette première étude est partagée avec celle de la deuxième étude, menée cette fois-ci par des médecins des hôpitaux de Shanghai et de la province chinoise du Hubei. Leur protocole, similaire à celui des médecins français, incluait 150 patients hospitalisés pour des formes "légères" ou "modérées" du Covid-19. 75 patients ont reçu de l’hydroxychloroquine en plus des soins standard, à une concentration plus élevée qu’en France : 1.200 mg les trois premiers jours puis 800 mg par jour. Les 75 autres patients n’ont reçu que les soins standards.
Et, ici encore, l’hydroxychloroquine ne fait pas la différence et les auteurs affirment que le traitement n’a pas eu d’efficacité antivirale.
En revanche, les patients sous traitement ont exprimé davantage d’incidents et d’effets indésirables, le plus souvent des diarrhées : 30% contre 9% dans le groupe contrôle. Reste à savoir si ces diarrhées sont dues à la prise du médicament ou à la maladie elle-même, puisque les diarrhées figurent parmi les nombreux symptômes du Covid.
Ici encore, l’étude porte sur un faible nombre de personnes. Des études plus larges seront donc nécessaires pour mieux évaluer l’efficacité de l’hydroxychloroquine seule, comme dans ces protocoles, ou associée à un antibiotique, l’azithromycine, comme dans le protocole défendu par le Pr Raoult.
Des effets indésirables variés
Si l'efficacité de l'hydroxychloroquine n'est pas confirmée par ces deux études, ses effets indésirables, eux, semblent bien présents. Fin mars, l’Agence régionale de Santé alertait sur des cas de toxicité cardiaque chez des personnes qui avaient pris de l’hydroxychloroquine en automédication.
Et aujourd’hui, c’est l’Agence nationale de sécurité du médicament (Ansm) qui rapporte l’alerte de l’Agence espagnole des médicaments (AEMPS) portant sur des cas de troubles neuropsychiatriques comme des psychoses, des tentatives de suicide et des suicides chez les patients traités avec de l’hydroxychloroquine.