Gel hydroalcoolique : son usage excessif favoriserait l’émergence de bactéries résistantes
L’usage répété du gel hydroalcoolique pour combattre le covid pourrait aider les bactéries résistantes à se développer, créant un nouveau problème de santé publique, alerte un scientifique britannique.
Le gel hydroalcoolique, à consommer avec modération ? Le docteur Andrew Kemp, chef du conseil scientifique de l’Institut britannique des sciences du nettoyage (BICS), s’inquiète dans la presse anglaise du risque d’émergence de bactéries résistantes à cause d’un usage massif de gel hydroalcoolique contre le coronavirus.
Avant sa récente interview dans le Daily Express le 30 août, le docteur Kemp avait déjà publié en mars dernier une étude aux allures d’éditorial dans l’American Journal of Biomedical Science and Research. "Les gels contenant de l’alcool ont la capacité non seulement d’augmenter le nombre de bactéries sur la peau mais aussi de modifier de manière significative les espèces de bactéries qui colonisent la peau" écrivait-il alors.
Voie royale pour les "superbactéries"
Sa crainte : que le combat contre le coronavirus n’ouvre la voie à une autre difficulté, celle des bactéries résistantes aux gels nettoyants.
Concrètement, l’alcool contenu dans le gel va tuer quasiment toutes les bactéries, sauf celles qui possèdent la capacité génétique de résister à cette substance. Et, si l’usage est répété, ces "superbactéries" vont se multiplier aisément en utilisant la place laissée vide par les bactéries sensibles à l’alcool.
Car les gels ne sont pas efficaces à 100%. En réalité, si un gel indique tuer 99,9% des bactéries, cela signifie qu’il tue "99,9 % des espèces bactériennes contre lesquelles il a été testé" note le docteur Kemp dans son interview au Daily Express.
Prenons un gel qui porte cette indication, "il peut y avoir plus d'un million de bactéries sur vos mains à tout moment, en laissant 10 000 en vie après la désinfection" compte-t-il. Celles-ci se trouvent alors dans des conditions idéales pour se développer après le passage du gel.
Plus de mal que de bien
Premier problème, si les bactéries en question sont pathogènes, elles risquent de contaminer plus facilement un plus grand nombre de personnes qu’avant l’usage excessif de l’alcool.
Deuxième problème, selon Andrew Kemp, "la résistance aux désinfectants est inextricablement liée à la résistance aux antibiotiques chez certaines espèces bactériennes pathogènes". Les bactéries résistent alors à la fois à la prévention - le nettoyage - et au traitement - les antibiotiques - des maladies qu'elles provoquent.
Autrement dit, le nombre de maladies bactériennes risque d’augmenter et il sera en parallèle plus difficile de les soigner. "Cela signifie que notre utilisation habituelle de gels pourrait en fin de compte nous causer plus de mal que de bien" s’inquiète le spécialiste.
Privilégier l’eau et le savon
Comment faire alors pour ne pas remplacer un mal par un autre ? Privilégier dès que les conditions le permettent le lavage des mains à l’eau et au savon, comme le préconise d’ailleurs l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) depuis le début de la pandémie de covid-19.
"Les gels pour les mains ne devraient être utilisés qu'en dernier recours et comme mesure temporaire" insiste le docteur Kemp. D’autant que "pour l'instant, il n'existe aucune preuve publiée que les gels à base d'alcool tuent le SARS-Cov-2" affirme-t-il auprès du Daily Express.