Des champignons hallucinogènes contre la dépression ?
Des champignons aux propriétés hallucinatoires, prescrits par votre médecin contre votre état dépressif… Un peu hallucinant, vous en conviendrez ! Pourtant, à en croire une étude scientifique publiée le 23 janvier 2012, dans Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), ces champignons pourraient être efficaces pour lutter contre la dépression.
Dans cette étude, l'équipe du Professeur David J. Nutt (Imperial College, Londres) a isolé la "psylocybine", cette substance aux effets délirants contenue dans les fameux champignons hallucinogènes et l'a administrée à 30 patients.
La psylocibine a pour effet connu d'inhiber l'activité de certains neurones et de déconnecter différentes zones du cerveau les unes des autres. Résultat : cela provoque des hallucinations et une altération des sensations corporelles et de la perception du temps.
Dans le cadre des recherches effectuées par l'équipe du Pr. David J. Nutt, les scientifiques ont alors observé par IRM que ce psychotrope puissant, ralentissait également certaines zones décrites comme hyperactives lors d'un état dépressif. D'où la perspective pour les chercheurs d'utiliser cette molécule comme alternative à l'arsenal thérapeutique généralement utilisé pour traiter la dépression.
Selon le Dr David Gourion, psychiatre à l'hôpital Sainte-Anne à Paris et expert auprès de la Haute Autorité de Santé (HAS), les travaux menés par l'équipe du Pr. David J. Nutt, qu'il juge "très crédible", "ouvrent de nouvelles portes dans la lutte contre l'état dépressif, mais les résultats sont à nuancer parce que cette étude a été menée sur des sujets non dépressifs."
Pour le Pr. Jean-François Bergman, professeur de médecine interne et thérapeutique à l'hôpital Lariboisière à Paris, "les risques de dépendance au produit ou encore les risques de réactions incontrôlées sont à craindre. Si le but est de soigner des dépressifs pour en faire des toxicomanes… Ces substances ne sont pas anodines. Certains peuvent ne pas les supporter du tout. Hors contexte médical, on a pu observer des tentatives de suicide suite à la prise d'une substance comme celle-ci."
Pour l'heure, les chercheurs britanniques n'ont pas constaté d'effets secondaires, et annoncent qu'ils mettront en place une étude clinique sur soixante patients dépressifs dans les prochains mois.
Source : "Neural correlates of the psychedelic state as determined by fMRI studies with psilocybin", PNAS 2012 ; published ahead of print January 23, 2012, doi:10.1073/pnas.1106171109