Rétinite pigmentaire : une thérapie cellulaire pour éviter la cécité
Parmi les maladies génétiques rares, il y a les rétinites pigmentaires. Les cellules de la rétine dégénèrent en raison de mutations. En France, 30 000 personnes sont atteintes de cette maladie qui conduit inexorablement à la cécité.
Adrien fait partie du premier essai français de thérapie cellulaire pour tester l’innocuité d’un traitement de cellule rétinienne. Une recherche soutenue par l’AFM-Téléthon.
"Adolescent, pendant une partie de foot comme toutes les autres, je sens qu’il y a un problème, je ne vois plus très bien le ballon, les copains s’assombrissent un peu. Il y a quelque chose qui cloche et je remarque ça dans ma vision nocturne", confie Adrien Maaninou, 40 ans.
Une perte progressive de la vue
Adrien est inquiet, il décide d’aller consulter un ophtalmologue pour passer quelques tests.
"L'ophtalmologue ferme les volets de son cabinet, il jette un crayon par terre et me demande de le ramasser, je n’y arrive pas et je dis qu’à priori personne ne peut le faire, il fait trop sombre dans la pièce.
Il me dit, "si moi j’y arrive". Pour lui le diagnostic est sans appel, j’ai une maladie dégénérative de la rétine qui s’appelle une rétinite pigmentaire et qui va amener inexorablement à la cécité. C'est un moment terrible, c’est une journée dont je me souviendrai toute ma vie", commente Adrien.
Durant 23 ans, seule sa perception nocturne est atteinte. Mais depuis deux ans, sa vision de jour s’est considérablement dégradée. Il décide alors alors d'intégrer un essai de thérapie cellulaire mené par le laboratoire de l’AFM-Téléthon et l’Inserm.
Une thérapie cellulaire à l'essai
Christelle Monville et son équipe ont mis au point un traitement cellulaire pour stopper la dégénérescence de la rétine. Cette membrane qui tapisse le fond de l'oeil.
"En général dans les rétinites pigmentaires, les cellules pigmentées de la rétine qui sont tout à fait à l’arrière ne fonctionnent plus bien. Ces cellules sont importantes parce que c’est un peu les baby-sitter des cellules photosensibles. Ce qui se passe chez Adrien, c’est qu’elles ne sont plus capables de nettoyer les photorécepteurs donc les déchets s’accumulent, ça devient toxique et du coup, les photorécepteurs vont se mettre à mourir. L’idée est d’arrêter la progression de la maladie parce qu'on ramène les cellules de soutien dans la rétine", explique Christelle Monville, chercheur à l'INSERM-I-STEM-AFM.
Pour y parvenir, les chercheurs ont transformé les cellules souches embryonnaires en cellules de la rétine, reconnaissables ici, à leur pigmentation foncée.
Une fois obtenue, ces cellules sont placées sur une membrane biologique bien au chaud à 37° pour se multiplier. Après 4 semaines, la membrane porte suffisamment de cellules rétiniennes.
Un patch cellulaire greffé
"On a les cellules pigmentées qui viennent tapisser la membrane pour former un feuillet de cellules", confie Christelle Monville.
Ce feuillet de cellules est ensuite enrobé de gélatine pour former un patch cellulaire souple. Celui-ci ne sera découpé qu’au bloc opératoire. Sur ces images d’intervention, le patch apparait en bleu.
Grâce à une petite incision de l’œil, le chirurgien introduit le patch pour le déposer à la surface de la rétine.
"Ce qu’on cherche avant tout de vérifier, c’est que le patch, quand il est implanté, ne va pas abîmer plus la rétine …et puis ce qu’on regarde aussi c’est si la progression de sa maladie va s’arrêter", conclut Christelle Monville.
Il y a 9 mois, ce patch a été implanté dans l’œil gauche d’Adrien et les nouvelles cellules de la rétine ont été tolérées par son organisme.
Des résultats encourageants
"Aujourd'hui ce que je peux ressentir c’est la même chose qu’avant l’opération. C'est plutôt formidable parce que normalement mon oeil aurait dû se dégrader pendant cette période d’un peu plus de 9 mois. J’ai l’impression que ça ne s'est pas passé, il ne s’est pas dégradé. L'œil droit continu par contre à dégénérer et ça je le perçois nettement", affirme Adrien.
Si le patch d’Adrien stoppe la progression de la maladie, un autre est en cours d'élaboration pour améliorer la vision. Jusqu’à présent 6 patients sur 12 ont été inclut dans l’étude.