Dossier médical partagé : comment ça marche ?

Après des années d'errance, le dossier médical partagé (DMP) sera généralisé à tous les Français début novembre. Il est censé être l'un des piliers de la transformation du système de santé annoncée par Emmanuel Macron. En quoi consiste le dossier médical partagé ? Comment ça marche ? On vous explique tout.

Maroussia Renard
Rédigé le
"Dossier médical partagé : comment ça marche ?", chronique de Maroussia Renard du 2 octobre 2018
"Dossier médical partagé : comment ça marche ?", chronique de Maroussia Renard du 2 octobre 2018

Le dossier médical partagé (DMP) est un des plus vieux serpents de mer du monde de la santé. Cette affaire traîne depuis 2004. A l'époque, le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy, a l'idée d'un carnet de santé numérique qui centralise toutes nos données. Mais cela n'a jamais fonctionné.

Ce DMP a végété pendant des années avant d'être relancé, puis presque abandonné... Finalement, le dossier médical partagé est ressorti des cartons en 2017. Il est actuellement testé dans neuf départements pilotes mais dès novembre, tous les Français pourront avoir leur DMP.

Que contiendra le dossier médical partagé ?

Le principe du dossier médical partagé est de regrouper au même endroit toutes les informations du patient. Il contiendra :

  • des renseignements sur les pathologies en cours, les antécédents, les allergies médicamenteuses ;
  • les vaccinations et les dates des derniers dépistages (frottis...) ;
  • des comptes-rendus de consultation, d'analyses de biologie, d'examens d'imagerie ou d'opérations ;
  • les courriers des spécialistes.
     

Dans la nouvelle version de ce DMP, les assurés peuvent désormais y faire figurer leurs directives anticipées (souhaits concernant leur fin de vie) et leur position sur le don d'organes. Autre nouveauté : l'Assurance maladie, qui a repris la main sur le DMP, va verser systématiquement dans chaque dossier ouvert, l'historique de toutes les prescriptions et remboursements depuis deux ans. Des informations précieuses pour éviter les actes redondants ou les interactions médicamenteuses. Toutes ces informations seront accessibles, à tout moment, depuis votre téléphone portable ou votre ordinateur.

Comment faire pour créer un dossier médical partagé ?

Dans les semaines à venir, tous les assurés vont recevoir un courrier de la Sécu avec un identifiant et un mot de passe. Il suffit ensuite de se rendre sur le site Mon-DMP pour créer un compte. Si vous n'êtes pas très à l'aise avec Internet, pas de panique, vous pouvez aussi vous rendre dans votre CPAM pour créer votre dossier avec l'aide d'un conseiller ou même chez votre pharmacien (qui touchera un euro par dossier ouvert). Mais ce DMP n'est pas obligatoire. C'est vous qui décidez et personne ne peut vous ouvrir un DMP sans votre consentement.

Qui alimente le dossier médical partagé ?

Le patient mais aussi les médecins alimentent le DMP. Mais du côté des généralistes, cela s'annonce compliqué car ils ont déjà presque tous des dossiers informatisés pour leurs patients. Pour eux, remplir le DMP est donc redondant. Et comme ces logiciels patients ne sont pas forcément compatibles avec le DMP - par exemple, on ne peut pas faire glisser un compte-rendu de consultation en un clic de l'un à l'autre - il faut ressaisir les données... Cela peut donc prendre du temps pour des médecins qui ont d'autres choses à faire.

Les syndicats sont aussi assez critiques sur la forme du DMP. Pour eux, le dossier médical partagé est un bazar, comme une grande bibliothèque avec plein de livres mais en désordre. Les informations ne sont pas triées, ni organisées donc il faut du temps pour rechercher et exhumer un résultat précis d'une prise de sang par exemple.

Qui a accès au dossier médical partagé ?

Seuls les professionnels de santé ont accès au dossier médical partagé. Rassurez-vous, ni les assureurs, ni les banquiers, ni les employeurs, ni même la Sécu ne pourront accéder à votre DMP. Les données sont ultra-sécurisées, stockées chez un hébergeur agréé par le ministère de la Santé.

Le seul à pouvoir accéder à tout votre DMP (à part vous) est votre médecin traitant. Les autres professionnels de santé ne peuvent voir que les infos nécessaires à votre prise en charge. Par exemple, un podologue n'a pas accès à vos derniers bilans gynécologiques. Et vous gardez la maîtrise totale puisque vous avez la possibilité de masquer des documents et de bloquer l'accès à certains soignants. La seule exception (que vous pouvez refuser au moment de la création) concerne les situations d'urgence. En cas d'appel au 15 ou d'urgence vitale, tout médecin peut avoir accès à votre DMP sans vous consulter : c'est ce qu'on appelle l'accès "bris de glace".

Le DMP enfin sur de bons rails ?

Il va falloir faire beaucoup de pédagogie pour que les Français et les soignants s'approprient le dossier médical partagé. Depuis la première mouture, on estime à près de 500 millions d'euros les dépenses pour ce DMP. Un nouveau fiasco serait donc malvenu.

Sur le papier, le dossier médical partagé est un formidable outil pour mieux coordonner les soins, et surtout éviter les actes injustifiés. Par exemple, si un jour, tous les médecins ont accès en un seul clic au scanner ou aux analyses biologiques réalisés à l'hôpital... cela évitera d'avoir à tout refaire systématiquement en ville. Or, les actes redondants ou inutiles coûtent très cher : environ un quart des dépenses de santé.