Fin de vie : des médecins généralistes souhaitent pouvoir utiliser un puissant sédatif
Après la mise en examen d'un médecin généraliste du Havre, la Fédération des médecins de France demande à avoir accès à un puissant sédatif, le midazolam, pour soulager des patients en fin de vie à domicile.
Il manque un médecin à Angerville-la-Martel en Seine-Maritime. Un de ses généralistes est sous le coup d’une « interdiction totale » d’exercer après avoir été mis en examen pour « administration de substance nuisible ayant entraîné la mort sans intention de la donner. »
L’homme de 64 ans est accusé d’avoir fourni à cinq de ses patients malades ou en fin de vie du midazolam, un puissant sédatif uniquement délivré en milieu hospitalier. Ce médecin généraliste se l’est procuré grâce à son épouse anesthésiste dans une clinique.
Une pétition de soutien
L’affaire suscite l’indignation de nombreux médecins généralistes qui se reconnaissent dans la situation de leur confrère. Près de 600 d’entre eux ont signé une pétition pour le soutenir. Ils demandent de pouvoir eux aussi prescrire et administrer du midazolam quand ils le jugent nécessaire.
Très utilisée en soins palliatifs, cette molécule est de la famille des benzodiazépines, comme le valium. Injectée à faible dose, elle permet de relâcher les muscles, de calmer l’anxiété et les convulsions. Elle sert aussi parfois à accompagner les patients en fin de vie.
« Nous utilisons ce médicament dans le cadre des sédations, c’est-à-dire quand un patient éprouve des symptômes réfractaires et que nous n’avons plus de possibilités thérapeutiques pour le soulager », explique le Dr Stéphane Picard, spécialiste de soins palliatifs au groupe hospitalier Diaconesses Croix Saint-Simon à Paris. « Nous décidons alors de les endormir avec ce médicament à dose progressive, jusqu’à obtenir une sédation plus efficace. »
Bien mourir à domicile
L’utilisation du midazolam est recommandée est par la Haute Autorité de santé (HAS) mais elle est strictement réservée au personnel hospitalier. Il est normalement impossible pour un médecin généraliste de l’administrer à un patient qui aurait décidé de finir sa vie chez lui.
Pour en bénéficier, le malade doit passer par une hospitalisation à domicile ou par des soins palliatifs. La situation est jugée aberrante par certains praticiens :
« Nous n’avons pas la capacité en France d’accueillir tout le monde en unité de soins palliatifs. » explique le Dr Stéphane Picard. « Il est donc nécessaire d’avoir une politique de santé qui permette aux patients de pouvoir finir leurs jours à domicile. Cela implique que les médecins généralistes qui sont le fer de lance de la médecine en ville puissent avoir ce médicament-là. »
Pour éviter toute dérives, un tel assouplissement pourrait s’accompagner d’une formation spécifique et d’ordonnances sécurisées.