France Télécom : pourquoi le harcèlement peut mener au suicide
Le procès contre France Télécom s’est ouvert cette semaine au tribunal correctionnel de Paris. Didier Lombard, l’ancien PDG et cinq ex-dirigeants de l’entreprise sont accusés de harcèlement moral sur leurs employés.
En 2006, l’objectif est clair au moment de la privatisation de France Télécom : augmenter la productivité à n’importe quel prix. La hiérarchie cherche alors à pousser hors de l’entreprise 22 000 salariés de leur plein gré. Didier lombard, l’ancien PDG et cinq ex dirigeants imposent alors des techniques de management destructrices. 35 salariés se sont donné la mort entre 2006 et 2009.
Nier la personne et vider le métier de son sens
Ces techniques managériales sont encore appliquées aujourdhui. « Ce sont des techniques de mise en scène de la disparition. L’employé est effacé de l’organigramme, on lui enlève son bureau, il n’a plus de connections intra ou internet», détaille Marie Pezé - Docteur en psychologie et responsable du réseau de consultations Souffrance et Travail.
Elle souligne un autre axe de manipulation : vider le métier de son sens. « On transporte le salarié sur un autre métier qui n’a absolument aucune signification pour lui, et pour lui c’est la négation de ses compétences ».
A l’heure où le risque du chômage empêche souvent la personne de changer de travail, Marie Peze rapproche l’état de détresse psychologique suite à un harcèlement moral au « terrible tableau de temps de guerre » qu’est le stress post traumatique.
« Je n’ai pas d’autres solutions que de me tuer pour que ça s’arrête »
Aller tous les jours travailler dans un milieu hostile où l’on nie vos compétences, où l’on nie vos caractéristiques, où l’on vous fait peur, où l’on vous menace si vous n’exécutez pas les ordres qu’on vous demande d’exécuter va très vite, selon la psychologue, barrer la capacité de l'être humain de réagir verbalement ces situations. Ce qui à terme va aboutir à ce que l'on appelle les suicides blancs : « Je veux juste que ça s’arrête. Je n’ai pas d’autre solution que de me tuer pour que ça s’arrête ».
A la suite de la série de suicides chez France Télécom, les pouvoirs publics avaient mis en place un plan d’urgence pour la prévention du stress au travail en 2009. Mais dix ans plus tard, il n’a pas suffit à éviter la multiplication des drames qui touchent désormais le secteur public.