L'auto-rééducation après une luxation de l'épaule

Après une luxation de l'épaule, le médecin propose habituellement trois semaines d'immobilisation. L'épaule est une articulation particulièrement instable et la récidive est la principale complication de la luxation d'épaule. D'où la nécessité d'avoir une bonne rééducation.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le
Chronique du Dr Stéphane Cascua, médecin du sport, du 8 octobre 2014
Chronique du Dr Stéphane Cascua, médecin du sport, du 8 octobre 2014

Lorsqu'une épaule s'est luxée, l'humérus, l'os du bras, est totalement sorti de son logement sur l'omoplate. Au passage, il a complètement déchiré le sac articulaire et les ligaments. Souvent le traumatisme se produit en montant, en reculant le coude comme lors d'un lancer. Après avoir ré-emboîté l'articulation, le médecin propose habituellement trois semaines d'immobilisation.

L'épaule est une articulation particulièrement instable. Et la récidive est la principale complication de la luxation d'épaule.

L'autorééducation en complément de la kiné traditionnelle

L'autorééducation est conseillée en complément du suivi médical et de la kinésithérapie traditionnelle. L'autorééducation se montre très bénéfique. Il est probable qu'elle réduise les délais de reprise du sport et diminue le risque de récidive.

Même immobilisé, on peut lutter contre la douleur. L'immobilisation "coude au corps" est souvent responsable de mauvaise posture douloureuse. L'écharpe tire sur le cou, la tête est penchée en avant. Des contractures musculaires se font sentir. Redressez votre buste. Bombez le torse. Reculez vos omoplates, comme si vous souhaitiez qu'elles se rejoignent en arrière. Remontez la tête, regardez devant vous. Vérifiez cette bonne attitude dans la glace. Conservez cette position le plus souvent possible. Reprenez-la dès que ça tire dans le cou.

Même immobilisé, il est possible de travailler les muscles qui stabilisent l'humérus dans l'omoplate. Plus qu'autorisé, ce travail est vivement conseillé. Dès les premiers jours, même sans bouger, vous pouvez contracter vos muscles. Cela est indispensable pour éviter qu'ils ne "fondent" du fait de l'inactivité imposée. Avec la main du membre supérieur sain, pour bloquer tout mouvement, placez un contre appui sur l'avant-bras ou le coude. Poussez comme si vous vouliez reculer votre poignet vers votre ventre. Toujours sans bouger, faites la même chose dans toutes les directions, comme si vous souhaitiez avancer, descendre et monter votre poignet. Technique identique au niveau du coude pour tenter de l'écarter ou l'écraser sur votre thorax.

Pour chacun des exercices, contractez vos muscles trois à six secondes. Récupérez une durée équivalente. Enchaînez cinq à trente fois, au moins deux fois par jour.

Bouger l'articulation en douceur

Pendant la période d'immobilisation, on peut bouger l'articulation en douceur. Après une bonne semaine, lorsque l'inflammation et la douleur se sont apaisées, quelques petits mouvements sont bénéfiques. Entre temps, il faut encore garder l'immobilisation une quinzaine de jours. Contrairement aux gestes incontrôlés de la vie quotidienne, ils ne sont pas dangereux. Ils peuvent provoquer une sensation de "tiraillement" mais vous devez cesser en cas de douleur. Dans ces conditions, ces exercices permettent de guider la cicatrisation de la membrane articulaire. Les fibres microscopiques s'alignent dans l'axe des contraintes mécaniques. Au final, les ligaments sont plus solides.

En conservant votre avant-bras en direction du ventre, faites lentement des petits ronds avec votre coude. Tournez dans un sens, puis dans l'autre. Augmentez progressivement l'amplitude sans dépasser 20 cm de diamètre. On parle d'exercice en pendulaire contrôlé. Effectuez cet exercice deux à trois fois par jour, pendant une à trois minutes.

Quelle rééducation après l'immobilisation ?

Sans immobilisation, le travail s'intensifie. Les membranes sont désormais cicatrisées. L'épaule doit retrouver toute sa mobilité, notamment au voisinage de la position de luxation, type "service au tennis". Il faut que les muscles gagnent en force, en endurance et en coordination. Toute la journée, ils ont pour mission de centrer finement l'humérus sur l'omoplate. Occasionnellement, quand le mouvement se rapproche de l'attitude dangereuse, il est crucial qu'il freine et contrôle parfaitement le geste. Votre kinésithérapeute vous guidera dans votre progression et devra confirmer que ces exercices vous sont bien adaptés.

Centrez votre épaule. L'exercice de pendulaire contrôlé devient un travail de renforcement et de coordination musculaire. Réalisez les mêmes mouvements de rotation de coude, mais prenez une charge dans la main. Une bouteille d'eau de plus en plus remplie fera l'affaire. Augmentez l'amplitude progressivement en prenant soin de laisser le coude nettement sous l'épaule. Effectuez cinq à trente rotations dans un sens puis dans l'autre, deux à trois fois par jour. Mais il faut aussi gagner en souplesse, donc n'hésitez pas à travailler vos stabilisateurs.

Ces exercices sont d'ailleurs bénéfiques à distance de la blessure, pour tous ceux qui se sont luxés l'épaule et qui souhaitent limiter le risque de récidive. Faites des pompes sur le mur. Commencez les mains rapprochées. Cette position ressemble à celle de votre immobilisation. Poussez et surtout freinez la descente.

Pour progresser, l'exercice évolue sur plusieurs paramètres :

  • Rapprochez-vous de la position "à risque"

Ecartez et montez peu à peu les mains. À quatre semaines du traumatisme, vos mains sont de chaque côté de votre buste mais restent à hauteur des coudes. À cinq semaines, vos mains sont plus hautes que vos coudes, à hauteur des épaules. À six semaines, vos mains sont au-dessus de votre tête.

  • Augmentez la charge

Eloignez de plus en plus les pieds du mur, puis effectuez vos pompes mains posées sur une table. Enfin, faites-les au sol. Décalez vos exercices : charge légère pour une position nouvelle, plus risquée et charge plus lourde pour une attitude acquise, plus sûre.

À six semaines du traumatisme, faites des pompes sur le mur à une seule main posée au dessus de la tête. Cela ressemble à la position de luxation. Freinez bien le mouvement, stoppez-le à plusieurs reprises pour travailler votre contrôle postural.

  • Associez un travail de coordination

Reprenez vos pompes sur le mur, mais posez la main sur un ballon plus ou moins gonflé. Vous pouvez aussi décaler les exercices : mains instables sur les positions acquises et mains fixes sur postures plus "à risque".

Reprendre le sport après une luxation de l'épaule

Tout d'abord, il faut garder la forme ! Quelques jours après votre luxation, il est possible de pratiquer le vélo de salle sans tenir le guidon et en conservant l'immobilisation. Quand vous parvenez à faire des pompes sur le mur, vous pouvez vous appuyer sur le guidon. L'idéal est d'intensifier votre entraînement grâce au vélo semi-couché qui dispose d'un dossier pour vous stabiliser.

À un mois de votre blessure, vous pouvez balancer les bras. Le footing est possible. Le vélo elliptique et le rameur sont conseillés pour associer des exercices de renforcement dans des positions sans risque.

Votre sport est une "rééducation spécifique". À six semaines du traumatisme, il est souvent possible de renouer avec les sports sollicitant les membres supérieurs. Pendant deux à quatre semaines, cette activité doit alors être considérée comme une rééducation spécifique. Le retour à la compétition ne peut avoir lieu à moins de deux ou trois mois de l'accident.

Prenons l'exemple du tennis. Commencez tranquillement par le tennis de table pour solliciter votre coordination sans contraintes mécaniques. Reprenez votre grande raquette à tamis pour un travail de gamme facile. Utilisez le "mur" ou sollicitez un partenaire sympathique et de bon niveau. Enchaînez les coups droits et les revers. Servez en peaufinant votre technique après une quinzaine de jours de tennis. Quand vos sensations sont de retour, un petit match est envisageable.

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