Pourquoi les 18-35 ans font-ils moins l'amour que leurs aînés ?
Si la génération Y semble plus libérée que la précédente, plusieurs études montrent pourtant qu'elle fait moins l'amour que les générations précédentes.
Un nombre décroissant de rapports sexuels
Si l'on en croit les magazines, la génération Y (née entre 1980-2000) aurait une sexualité libérée, avec une initiation plus précoce à la sexualité, davantage de partenaires sexuels et d'histoires d'un soir, notamment grâce aux sites de rencontre comme Tinder. Mais la vie réelle n'est visiblement pas celle des magazines si l'on en croit plusieurs études, l'une anglaise en 2013 ou l'une plus récente, américaine et publiée en 2017, dans les Archives of sexual behavior.
Les auteurs constatent une diminution de l'activité sexuelle de plus en plus marquée : les jeunes adultes Y déclarent sept rapports sexuels de moins par an que ceux du début des années 90, puis neuf de moins par rapport à ceux de fin des années 90 et onze de moins, comparé au début des années 2000 (54 contre 65). Dans une étude de 2016, dans les Archives of sexual behavior, les mêmes auteurs relevaient une diminution de l'activité sexuelle par le biais du nombre de partenaires sexuels. Il y avait davantage de personnes sans partenaire dans la génération actuelle, que chez les babyboomers (15% contre 6%). Le pourcentage de femmes sexuellement inactives (sans partenaire sexuel) triplait entre les deux générations (5% contre 16%) et ce pourcentage doublait chez les hommes (8 contre 14%).
D'après le Dr Gilbert Bou Jaoudé, sexologue, ces travaux font émerger une tendance observée par tous les spécialistes : la vie sexuelle se libère comme le prouvent la diminution de l'âge du premier rapport (qui est désormais stabilisé à 17 ans), l'augmentation du nombre de partenaires sexuels déclarés chez les femmes, la prolongation de la vie sexuelle après la ménopause. " On a l'impression d'une vie sexuelle plus libre, plus libérée, plus prolongée, plus variée, excepté pour la fréquence des rapports sexuels chez les jeunes, qui est diminuée de façon significative, commente le sexologue. Il y a 15% en moyenne (de 10 à 18%) de rapports en moins dans la tranche d'âge entre 18 et 25 ans. C'est en diminution alors qu'il y a plus de possibilités d'avoir des partenaires sexuels !"
Objets connectés, X, stress et perturbateurs endocriniens en cause ?
Si aucune cause franche n'explique avec certitude ce constat, plusieurs hypothèses sont soulevées, avec en premier lieu l'apparition des objets connectés à Internet et des réseaux sociaux. "Ils diminuent le temps où le couple est à deux, constate Gilbert Bou Jaoudé. On est connecté avec les personnes lointaines et virtuelles, mais déconnecté avec la personne proche et réelle." Le fait de voir et d'être en connexion avec d'autres personnes, se prolonge même après avoir déconnecté...
Le médecin estime que la sexualité féminine est davantage impactée par ce phénomène : la libido féminine nécessite de la complicité, ce n'est pas une sexualité uniquement de pulsions puisqu'elle a besoin d'un sas de complicité et de rapprochement, que les objets connectés amputent considérablement. Chez les hommes surtout, le porno pourrait également intervenir : " les personnes qui ont des pulsions sexuelles fortes et fréquentes, ont plus facilement accès au X avec les objets connectés, reprend le médecin. Ils ont un comportement sexuel solitaire alors qu'avant, ils allaient plus vers leur partenaire." D'après le sexologue, l'implication des objets connectés est l'hypothèse la plus répandue et la plus logique mais il y a d'autres explications à ses yeux.
Avec en tête de liste, le mode de vie beaucoup plus stressant et anxiogène qu'avant... "Le monde social et professionnel génère plus de stress et d'anxiété qu'avant et cela a un impact sur la baisse de la fréquence sexuelle car on sait que dans la plupart des cas, l'anxiété diminue la libido...".
Le sexologue évoque également une troisième piste : "selon moi, les perturbateurs endocriniens joueraient un rôle, analyse-t-il. Nous constatons beaucoup plus de puberté précoce, de cancers de testicules, de déficits en testostérone inexpliqués et d'infertilité. Il y a donc une perturbation du système endocrinien et sans doute du fonctionnement sexuel, avec une légère baisse des hormones sexuelles et donc de l'appétence sexuelle..."
Les moyens d'y remédier
La sexualité reste un moyen exceptionnel de se faire du bien et de se connecter à l'autre, et non pas à son smartphone ! Cette diminution quantitative n'est pas forcément problématique si la qualité de la vie sexuelle ne baisse pas et que les couples sont satisfaits.
Si en revanche elle n'est pas satisfaisante, avoir conscience des causes probables expliquant la baisse de la fréquence sexuelle, offre la possibilité d'agir, au moins sur les deux premières.
Le couple pourrait par exemple se réserver des temps privilégiés à deux, où téléphones, tablettes et ordinateurs sont rangés et hors d'atteinte. Ils devraient d'ailleurs être interdits de séjour dans la chambre à coucher, tout comme la télévision, pour transformer ce lieu en espace sacré, propice à la tendresse et aux galipettes !
De même, agir sur le stress et l'anxiété est possible, à condition de se donner les moyens d'une prise en charge globale : activité physique, relaxation ou méditation, bonne hygiène de vie avec une alimentation équilibrée et un sommeil respecté, voire psychothérapie lorsque l'on est dépassé par le stress. Développer sa sensualité est également une jolie façon de renouer à deux avec le plaisir.
Ces petits ajustements devraient déjà dégager un peu de temps et injecter un peu plus d'envies sexuelles au plus grand bonheur des couples... Et si d'autres facteurs sont en cause, il est recommandé d'en parler à un sexologue.