Emission spéciale : à la découverte du cerveau
Siège de nos émotions, de nos réflexions, de notre identité, notre cerveau nous permet de percevoir et de recevoir le monde qui nous entoure. Notre cerveau est constitué de plus de 100 milliards de neurones connectés entre eux. C'est le quartier général du système nerveux que l'on qualifie de central. Pourtant cet organe n'a pas encore livré tous ses secrets. À l'occasion d'une émission spéciale cerveau du Magazine de la santé, le 10 mai 2013, nous avons tenté de percer les mystères de cet organe.
Au coeur du cerveau
Le centre de commande du système nerveux est l'encéphale. Il est formé principalement du cerveau qui occupe à lui seul 85%. Il est divisé en deux hémisphères, droit et gauche. L'hémisphère droit commande la partie gauche du corps et l'hémisphère gauche contrôle la partie droite du corps.
L'encéphale est aussi formé du cervelet et du tronc cérébral. Le cervelet est responsable de la coordination des mouvements et de l'équilibre. Quant au tronc cérébral, il relie le cervelet à la moelle épinière et commande certaines fonctions vitales comme la respiration.
Le cortex, c'est la matière grise. Cette couleur est due au fait qu'elle renferme le corps cellulaire des neurones. Ces corps cellulaires se poursuivent par des prolongements appelés axones et sont entourés de substance grasse, la gaine de myéline. Ces axones sont distribués de part et d'autre du cerveau comme des câbles pour assurer la transmission de l'influx nerveux. Les réseaux de neurones qui forment le cortex, sont répartis en différentes régions que l'on appelle les aires corticales, chacune a une fonction spécifique.
Les aires corticales reçoivent des informations sensorielles fournies par des capteurs répartis dans le corps comme ceux de la vision, de l'audition, du goût ou encore du toucher. Aujourd'hui, il est possible de visualiser ces zones grâce à l'imagerie médicale et notamment grâce à l'imagerie par résonnance magnétique, l'IRM qui a permis de faire de grands progrès dans la connaissance du cerveau.
Le cerveau est réparti en plusieurs zones mais ce n'est pas tout. Au coeur du cerveau se trouve le système limbique, il est responsable des émotions comme la colère, la joie ou la peur. Le système limbique renferme également l'hypothalamus qui est le centre de régulation de la faim et de la température. L'hypophyse, elle, est capable d'orchestrer l'ensemble des sécrétions hormonales des différentes glandes de l'organisme. Dans cette région, on trouve aussi le centre de la mémoire, l'hippocampe qui permet de stocker et de retrouver les souvenirs.
Une équipe de chercheurs s'intéresse de près à cette zone afin de mieux comprendre la mémoire. Ces chercheurs travaillent actuellement sur des modèles animaux. Si le cerveau d'une souris et le cerveau de l'homme ne sont pas totalement identiques, contrairement au cortex qui est une structure propre à l'homme et aux primates, l'hippocampe est assez similaire. On estime dans ce type d'expérience que l'hippocampe est modifié de la même façon par le stress chez les deux individus. Et une fois ces anomalies identifiées, les chercheurs savent interpréter les résultats pour les adpater à l'homme.
Un institut pour percer les mystères du cerveau
L'Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM) est un centre de recherche de dimension internationale, qui a ouvert ses portes en septembre 2010 dans l'enceinte de l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière à Paris.
Son président et fondateur, le Pr Gérard Saillant, était l'invité du Magazine de la santé vendredi 10 mai 2013. Il nous explique l'importance de l'Institut du cerveau et de la moelle épinière, son but et son originalité.
Tumorothèque : une banque pour conserver les tumeurs au cerveau
La tumorothèque de l'Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM) est la plus grande banque de tumeurs cérébrales.
Si l'on peut donner ses organes, on peut aussi faire don de sa tumeur. Des échantillons qui, pour la recherche, ont une valeur inestimable.
La tumeur cérébrale est une masse effrayante dont on ne sait pas grand-chose. Quelle est sa dangerosité ? Quel est son plan d'action ? Son mode d'attaque ? Pour mieux la connaître, il faut la regarder de plus près.
Une fois retirée par le neurochirurgien, le morceau de tumeur cérébrale est apporté au laboratoire d'anatomo-pathologie. Une petite partie de la tumeur est alors immédiatement prélevée, écrasée sur une lame afin de pouvoir quelques minutes seulement après son extraction être observée au microscope. Ce premier examen sert tout d'abord à déterminer la nature et la gravité de la tumeur cérébrale. Il permet également de vérifier que l'échantillon prélevé pour la tumorothèque est bien tumoral et ainsi d'éviter de mettre en tumorothèque des échantillons non représentatifs.
Une partie de la tumeur est ensuite congelée à - 195°C, dans de l'azote liquide. On parle alors de cryopréservation. Un moyen de conserver parfaitement et indéfiniment les composants cellulaires de la tumeur comme l'ADN ou l'ARN.
Une fois par semaine les échantillons sont transférés à l'Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM). Plus de 12.000 échantillons font de ce lieu la plus importante bibliothèque de France de tumeurs cérébrales. Le but de cette conservation est la recherche. Les tumeurs cérébrales sont en effet analysées de manière bien plus fine qu'en anatomo-pathologie car on y pénètre le cœur des cellules malades. Dans les cellules tumorales, l'ADN normal du patient est altéré. Il est le siège de mutations, de gains ou de pertes de gènes.
L'intérêt de la tumorothèque est d'avoir à disposition des milliers d'échantillons qui permettent de comparer les composants biologiques des tumeurs tout en sachant ce que fut le devenir des patients. Ainsi les chercheurs peuvent savoir si un patient a bien supporté la chimiothérapie en ayant telle ou telle mutation, combien de temps il a survécu… Des informations essentielles pour pouvoir mettre au point de nouvelles prises en charge.
Il faudra encore attendre plusieurs années avant que ces recherches donnent naissance à des thérapies individualisées. Une avancée scientifique à laquelle auront participé les milliers de patients ayant accepté de faire don de leur tumeur.
Lire dans les pensées, une réalité ?
Aujourd'hui le grand fantasme autour des recherches sur le cerveau est que l'on puisse, grâce à l'imagerie cérébrale, lire dans nos pensées les plus secrètes. Ce demi fantasme n'est ni tout à fait vrai, ni tout à fait faux.
Nous savons depuis très longtemps que deux zones cérébrales bien distinctes se chargent d'analyser les images visuelles et d'analyser les sons. Très logiquement quand nous voyons des images, cela entraîne une activation des régions visuelles que peut montrer l'IRM fonctionnelle. Quand on entend des sons, cela entraîne une activation des régions auditives. Si nous prenons les choses à l'envers, on peut dire que si on voit des activations dans les régions visuelles, on peut en déduire que le sujet est en train de voir quelque chose. Et si les activations sont dans les régions auditives, on peut en conclure que le sujet entend des sons.
Peut-on décoder le contenu des pensées ?
Depuis une douzaine d'années, on sait au moins deviner quel genre d'objet un sujet est en train de regarder. Une expérience Jim Haxby a montré comment on peut deviner, en se fondant sur la forme exacte des activations, si les sujets étaient en train de voir une maison, un chat, une chaussure ou une chaise.
Pour le moment, il est difficile d'aller plus loin en devinant par exemple de quelle maison, chaussure, chat ou chaise particulière il s'agit car nous en sommes encore aux balbutiements. Une première étape est de deviner, sur la base des images cérébrales, quel visage, quelle maison, ou autre, le sujet est en train de regarder, mais seulement parmi une petite liste de possibilités.
Il y a quelques années Jack Gallant a présenté à des sujets 1.750 images diverses dans une machine d'IRM. En étudiant comment chaque point du cerveau réagissait aux différentes images, il a pu identifier les préférences de chaque point du cerveau pour des images placées à tel ou tel endroit, orientées comme ceci ou comme cela, pour les détails ou pour la forme générale. Ensuite, il a présenté 120 autres images aux sujets tout en enregistrant encore leur activité cérébrale. En utilisant la connaissance acquise sur les préférences des différents points pour tel ou tel type d'image, il a pu deviner, décoder, laquelle des 120 images nouvelles les sujets étaient en train de voir.
Pour faire comme dans un film de science-fiction, on aimerait non seulement deviner laquelle d'une liste d'images le sujet est en train de regarder, mais aussi reconstruire sur un écran le contenu, l'aspect de ce que le sujet a dans la tête. Bertrand Thirion a par exemple montré que cela était possible. Les sujets de son étude voyaient sur un écran de gros points noirs, comme des faces de dés, et il était possible sur la base des images cérébrales, de reconstituer à peu près ce que les sujets étaient en train de voir, et de "lire" dans leur cerveau l'image des faces de dés qu'ils avaient sous les yeux.
On essaie actuellement de faire des choses comparables avec des images plus complexes, mais ces travaux mettent en oeuvre des techniques très complexes. Jack Gallant a par exemple présenté des images de scènes très variées à des sujets. S'il n'est pas parvenu à la reconstruire vraiment à partir des images cérébrales, il a réussi à sélectionner automatiquement, parmi 6 millions d'images trouvées sur Internet, celle qui ressemble le plus à la scène que le sujet regardait quand l'enregistrement a été réalisé.
Entrer dans l'intimité des pensées
Deviner ce à quoi vous pensez marche exactement comme deviner ce que vous êtes en train de regarder. La forme exacte des taches d'activation permet de savoir si vous pensez à un fruit, une maison, un visage, un outil... Un récent article de l'équipe de Yukiyasu Kamitani porte sur la lecture des rêves. Ces chercheurs ont fait dormir régulièrement trois sujets dans une machine d'IRM. Dès que ces sujets s'endormaient, ils les réveillaient, en leur demandant de décrire ce à quoi ils rêvaient. Il ne s'agissait pas de rêves à proprement parler, mais de ce qu'on appelle des hallucinations hypnagogiques, images qui s'imposent à nous pendant que nous nous endormons.
Les chercheurs ont ainsi collectionné 200 "rêves" chez chaque sujet, en notant les images principales que rapportaient les sujets (des voitures, des visages, des escaliers…). Ils ont montré que l'analyse des images d'IRM enregistrées juste avant qu'on ne réveille les sujets pour les interroger permet de deviner ce à quoi ils rêvaient.
Cerveau : les livres de Gérard Collard
Gérard Collard nous dévoile sa sélection de livres spéciale cerveau...
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Pourquoi les filles sont si bonnes en maths
Et 40 autres histoires sur le cerveau de l'homme
Laurent Cohen
Ed. Odile Jacob, janvier 2013 -
Le cerveau sur mesure
Jean-Didier Vincent, Pierre-Marie Lledo
Ed. Odile Jacob, janvier 2013
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Le cerveau de cristal
Ce que nous révèle la neuro-imagerie
Denis Le Bihan
Ed. Odile Jacob, septembre 2012 -
Incroyable corps humain
Jack Guichard
Ed. Larousse, décembre 2009 -
Le corps
Auteur collectif
Ed. Mes Premières Découvertes, avril 2008 -
Histoire du corps
Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello
Ed. Points, octobre 2011 -
Les mensonges de l'esprit
Les carnets de Max Liebermann
Frank Tallis
Ed. 10 X 18, janvier 2008 -
Absences
Alice Laplante
Ed. Robert Laffont, mars 2013 -
Sigmund Freud : à la découverte de l'inconscient
Ruth Sheppard
Ed. Larousse, septembre 2012
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