Surconsommation d'antibiotiques : pour des mesures fortes
Face à la montée des résistances aux antibiotiques et à la surconsommation d'antibiotiques en France, un rapport du Centre d'analyse stratégique (CAS) préconise plusieurs actions concrètes, notamment un meilleur encadrement des prescriptions et le développement de nouvelles stratégies anti-infectieuses.
"La rationalisation et la diminution des consommations d'antibiotiques en médecine humaine et dans les élevages doivent être une priorité" a indiqué Vincent Chriqui, directeur général du CAS, institution dépendant du Premier ministre, chargée de faire des propositions.
La France a longtemps été numéro un européen de la consommation d'antibiotiques. A la suite d'une prise de conscience des médecins et du grand public, la consommation a diminué de 16% entre 2000 et 2010.
Mais elle "a légèrement repris depuis 2009" et en 2012 la France demeure le troisième plus gros consommateur européen d'antibiotiques pour la médecine humaine, a souligné M. Chriqui lors de la présentation du rapport.
"Dans le domaine vétérinaire, la France fait également partie des plus gros consommateurs : c'est le deuxième consommateur européen d'antibiotiques en tonnage absolu", a-t-il ajouté.
L'une des pistes proposées par le CAS est d'envoyer tous les ans à chaque médecin un "bilan détaillé de leur profil de prescription d'antiobiotiques comparé aux moyennes départementale et nationale".
Autres idées : la création de centres de conseil en antibiothérapies comme cela existe déjà dans deux régions, en Pays-de-Loire et Lorraine, qui donnent des conseils via une "hotline" ou par Internet.
Pour ce qui est de l'usage vétérinaire, il faut "réduire drastiquement la consommation d'antibiotiques chez l'animal", s'alarme le CAS, car par ricochet, la surconsommation dans les élevages affecte la santé humaine.
Cela pourrait se faire par des "engagements volontaires" des filières d'élevage ou bien "par des interdictions réglementaires", selon M. Chriqui qui cite l'exemple du Danemark où a été mis en place un système de menaces et sanctions pour les éleveurs (principalement de porcs) dépassant des plafonds de doses d'antibiotiques aux animaux.
Enfin, le rapport souligne la nécessité de "stimuler la recherche".
Une piste serait de développer la phagothérapie, l'usage de virus bactériophages spécifiques contre les bactéries pathogènes.
"Le renouveau de la phagothérapie se heurte à plusieurs écueils : l'absence d'investissement par les grands industriels pharmaceutiques et un cadre réglementaire peu clair et inadapté", selon M. Chriqui.
Le CAS propose de "clarifier le statut réglementaire de la phagothérapie" et de mettre en place un programme de recherche français pour en évaluer le potentiel thérapeutique.
Source : "Les bactéries résistantes aux antibiotiques", Centre d'analyse stratégique (CAS), Note d'analyse 299, novembre 2012
En savoir plus
- Antiobiotiques : un test pour évaluer la résistance des bactéries
- Antibiotiques : encore trop automatique !
- Antibiotiques : quand la superbactérie résiste !
- Alimentation : des antibiotiques dans nos assiettes ?
- La résistance aux antibiotiques remonterait à l'Âge de glace !
- Antibiotiques : lutter contre la résistance des bactéries
- La phagothérapie : virus contre bactéries