Insectes au menu : quelle vigilance sanitaire ?
L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l’agriculture (FAO) s'est récemment prononcée en faveur du développement de l'élevage d'insectes à grande échelle, à des fins de consommation humaine. L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) publie ce 9 avril un avis relatif aux dangers éventuellement associés à ces mets croustillants, et aux besoins de recherche sur la question.
Des risques variés, mais pas de cadre réglementaire
L’Anses a réalisé ces derniers mois un état des lieux des connaissances scientifiques sur les risques liés à la consommation d’insectes. C’est qu’à l’échelle européenne, l’entomophagie "semble bénéficier d’un engouement croissant et plusieurs projets industriels et programmes de recherche accompagnent ce secteur naissant" notent les auteurs du rapport… alors même que les cadres réglementaires (notamment sanitaires) restent très mal définis.
Les auteurs notent que, comme tout aliment, "les insectes peuvent véhiculer certains dangers". Dans leur cas, les risques potentiels seraient essentiellement liés :
- à des allergènes communs à l’ensemble des arthropodes (acariens, crustacés, mollusques… voir encadré) ;
- à des parasites, des virus, des bactéries et leurs toxines ou encore des champignons pouvant se développer sur les insectes ;
- à des substances chimiques (venins, médicaments vétérinaires utilisés dans les élevages d’insectes, polluants présents dans l’environnement ou l’alimentation des insectes, etc.) ;
- à des agents physiques (parties dures de l’insecte comme le dard, le rostre, etc.) ;
- aux conditions d’élevage et de production.
En outre, comme pour tout aliment, une conservation inadaptée peut rendre un insecte comestible impropre à la consommation humaine.
Attention aux allergies croisées !
En attendant "la mise en place de normes spécifiques et d’un encadrement adapté", l’Anses recommande la prudence aux consommateurs présentant des prédispositions aux allergies". En effet, les insectes et de nombreux arthropodes (acariens, crustacés, mollusques, etc.) possèdent des allergènes communs (on parle d’allergies croisées).
Beaucoup d'inconnues demeurent
L’Anses reconnaît toutefois un réel besoin de recherches complémentaires "pour mener une évaluation complète des risques sanitaires liés à la consommation des insectes". Dans ce contexte "d’incertitude et de manque de données", les auteurs de l’avis recommandent :
- d’établir, au niveau européen, des listes des différentes espèces et stades de développement d’insectes pouvant ou non être consommés ;
- de définir un encadrement spécifique des conditions d’élevage et de production des insectes et de leurs produits, permettant de "garantir la maîtrise des risques sanitaires" ;
- de fixer des mesures de prévention du risque allergique, à la fois pour les consommateurs et en milieu professionnel.
Les auteurs notent que le développement de filières de production d’insectes, "depuis l’élevage jusqu’à l’abattage", devrait amener "à se poser la question du bien-être animal, celui-ci ayant été jusqu’à présent très peu exploré chez la plupart des invertébrés".
Comme l'observe Le Figaro, il n'existe pas aujourd’hui en France d'autorisation de commercialisation d'insectes à des fins de consommation humaine. En effet, la réglementation européenne actuelle pose en préalable à la commercialisation d’un aliment "dont la consommation est restée négligeable en Europe [avant 1997]" la démonstration de son innocuité. Les professionnels du secteur estimeraient leur pratique légale "au nom de la libre circulation des biens en Europe", certains pays autorisant la vente d’insectes.