Addictions : faut-il se méfier des smartphones ?
Dans la rue, à l'école, au cinéma, au sport, au lit,... Les smartphones sont partout et consultés parfois à outrance, pouvant entraîner des comportements addictifs. Les adolescents sont particulièrement concernés. La plupart d'entre eux ne peuvent plus s'en passer, accros, certains deviennent de véritables zombies du numérique.
En quelques années, l'usage du téléphone multifonctions s'est imposé en force. Or, cet appareil est devenu une source d'addiction réelle pour de nombreux utilisateurs, les adolescents en première ligne. "Pour le moment, en France, aucune étude n'affirme que les adolescents sont en proie à une dépendance au smartphone", explique le Dr Laurent Karila, psychiatre-addictologue et vice-président de l'association SOS addictions. "Toutefois, en marge de campagnes de prévention menées dans le cadre scolaire, on remarque une tendance au développement des comportements addictifs au smartphone chez les jeunes."
L'Asie fortement touchée par la dépendance au smartphone
Si en France, cette dépendance aux smartphones n'est pas un phénomène répandu, sur le sous-continent asiatique, elle est une réalité. Selon les informations relayées par l'Agence France Presse (AFP), à Singapour, comme dans un nombre grandissant de pays, des psychiatres militent pour que l'addiction aux smartphones soit reconnue comme trouble psychologique. Avec la Corée du Sud, la Chine et Taïwan, la cité-État est l'un des pays d'Asie les plus concernés par ce phénomène.
Singapour et Hong Kong détiennent le record régional du plus grand nombre d'utilisateurs de téléphones multifonctions par habitant, selon un rapport publié l'an dernier par le cahier d'étude Nielsen. 87% des 5,4 millions de Singapouriens sont ainsi munis d'un smartphone, contre 65% aux Etats-Unis. Ils passent en moyenne 38 minutes par session sur Facebook, soit presque deux fois plus que les Américains, selon la société Experian.
Un trouble silencieux
"L'addiction au web devrait être classée dans les troubles mentaux", expliquait récemment Adrien Wang, psychiatre au centre médical de Gieneagles, dans un entretien avec l'AFP. "Les patients viennent pour des troubles liés au stress et à l'anxiété, mais je me rends compte que leur mécanisme de survie est de se connecter en ligne et d'aller naviguer sur les réseaux sociaux."
Un constat partagé par le Dr Karila. "Les usagers s'endorment avec leur smartphone, le consultent durant leurs insomnies. Ce qui a pour conséquence de perturber le sommeil".
L'addictologue note que le smartphone est un objet qui rassure. Grâce à ses fonctionnalités, une information oubliée devient tout de suite accessible. "Ce confort optimise la dépendance. Les utilisateurs les plus accros peuvent le considérer comme un doudou".
L'argument financier contribue à développer la dépendance des jeunes au smartphone. "Aujourd'hui, les prix des smartphones et des forfaits proposés par les opérateurs rendent ces objets accessibles à un grand nombre de personnes", nous précise le Pr Amine Benyamina, psychiatre-addictologue à l'hôpital Paul-Brousse à Villejuif (région parisienne). Une stratégie marketing qui encourage les parents à équiper de plus en plus tôt leurs enfants d'un téléphone portable, motivés également par le fait de pouvoir contrôler leurs activités. D'où leur arrivée massive dès l'entrée du collège. Selon un sondage TNS Sofres/AFOM, réalisé en août 2010, 82% des Français de 12 ans et plus sont utilisateurs d'un téléphone mobile.
Toutefois, "le smartphone ne doit pas être diabolisé. "Il s'agit d'un produit de consommation qu'il faut savoir réguler", nuance le Dr Laurent Karila. Un effort peu évident pour les adolescents. Aux parents d'y veiller.
Mieux gérer la consommation de ses enfants
Concernant les adolescents, quelques recommandations sont préconisées par les spécialistes pour leur éviter une trop grande dépendance.
Selon eux, les parents doivent établir un contrat avec leurs enfants. "Le smartphone doit être interdit le soir dans la chambre, à condition que les parents respectent aussi ce terme du contrat", conseille le Pr Laurent Karila. D'un commun accord, les parents peuvent ainsi gérer la consommation du smartphone de leurs enfants. Ces derniers bénéficieront alors de temps de pause qui leur permettront de retrouver le goût d'autres activités, comme la lecture ou encore le sport.
Parallèlement, les parents doivent rester vigilants sur le contenu des sites consultés par leurs enfants. Car l'interactivité permanente qu'offre Internet peut parfois mener les adolescents à faire de mauvaises rencontres sur la toile. Selon une étude TNS Sofres-UNAF et Action Innocence, publiée en septembre 2009, 15% des adolescents équipés d'un téléphone mobile ont déjà donné leur numéro de mobile à un inconnu rencontré sur Internet. Et, 20% des filles équipées considèrent avoir déjà été harcelées sur leur mobile (contre 12% pour les garçons), d'après la même source.
Il serait toutefois contre-productif de sanctionner les adolescents de manière drastique. Comme le résume le Pr Amine Benyamina, "rien ne sert d'interdire à un adolescent l'accès à son smartphone, car cela l'isolera de son environnement."
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