Comment consommer moins de médicaments ?
La France demeure l'un des premiers consommateurs européens de médicaments, malgré une tendance à la baisse observée en 2012. Dans une note publiée le 5 mars 2014, le commissariat général à la stratégie et à la prospective - un service dépendant du Premier ministre - suggère de "repenser l'ensemble du circuit du médicament", en s'appuyant sur les expériences d'autres pays.
La surconsommation de médicaments a des conséquences néfastes sur la santé des populations. Afin d’inverser durablement la tendance, le Commissariat général à la stratégie et à la prospective a présenté mercredi 5 mars 2014 quelques pistes d'actions.
"En France", note-t-il, "la prescription d'un médicament est étroitement liée à la consultation médicale". Pour les Français, le médecin est en somme celui qui prescrit des médicaments. Et entre son cabinet et le domicile du patient, l’escale chez le pharmacien est presque rituelle... Il s'agirait donc de "prescrire autrement", c’est-à-dire que l'ordonnance présente plus naturellement autre chose qu'une liste de comprimés à avaler.
L'ordonnance "gagnerait à être utilisée autrement, notamment pour prescrire des modes de prises en charge non médicamenteuses", concernant par exemple l'hygiène de vie, comme aux Pays-Bas.
Réduire l'offre
Le commissariat observe par ailleurs que l'offre de médicaments est très "abondante" sur le territoire français. Or, les connaissances des médecins en termes pharmaceutiques sont, de son point de vue, "mal adaptées aux besoins et souvent jugées insuffisantes". Les auteurs de cette note plaident donc pour que des outils "réduisant le choix possible" de médicaments soient mis à la disposition des praticiens, par exemple une liste de référence comme en Suède.
Les membres du commissariat général suggèrent également de systématiser les groupes d'échanges sur les pratiques de prescription, dans le cadre desquels médecins et pharmaciens peuvent dialoguer.
La consommation abusive de médicaments soumis à prescription augmente dans le monde et représente une "menace croissante" pour la santé publique, a mis en garde mardi 5 mars 2014 l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) dans un rapport annuel.
L’OICS invite les Etats à réduire l'offre disponible de ces médicaments et à sensibiliser le public, au moyen par exemple de journées de reprise des médicaments sur ordonnance. D'après l'OICS, ces initiatives ont permis de retirer aux Etats-Unis plus de 1.700 tonnes de médicaments de la circulation depuis 2010.
Comprendre ce que l'on avale
Les auteurs de la note insistent sur l'importance de développer la mission de conseil des pharmaciens - un rôle qui n’a été que récemment valorisé, avec l'instauration de nouvelles grilles de rémunération en 2013. Le pharmacien pourrait ainsi "informer systématiquement" l'usager sur la posologie, les effets secondaires, etc. Il pourrait également s'occuper de la préparation de doses individuelles à administrer, une mission qui pourrait "gagner en importance" avec le vieillissement de la population.
Par ailleurs, pour éviter les mauvaises pratiques liées à l'automédication, les usagers doivent être "davantage et mieux informés". Ainsi, l'emballage du médicament pourrait être "plus lisible" et la notice "simplifiée".
Le commissariat plaide également pour la dispensation à l'unité des médicaments, qui doit être expérimentée cette année.
VOIR AUSSI :
- Le ''service médical rendu'' bientôt inscrit sur les boîtes de médicaments, reportage et article du 3 mars 2014.
- La revue Prescrire dresse une liste noire de 68 médicaments, article du 31 janvier 2014.
- Médicaments : bientôt la fin du monopole des pharmacies ? article et reportage 19 décembre 2013.
- Vente de médicaments : la guerre des lobbies, article du 4 novembre 2013.
- Pas de médicaments en grandes surfaces pour le gouvernement, article 12 juillet 2013.
La surprescription (et la mauvaise prescription) d'antibiotiques dans les hôpitaux augmente la résistance microbienne à ces traitements. Or, selon un récent rapport des autorités sanitaires étasuniennes, "un tiers des ordonnances [pour traiter des infections urinaires] ou pour des antibiotiques comme la vancomycine contiennent des erreurs". L'erreur la plus fréquente est de prescrire des antibiotiques trop longtemps et sans avoir effectué des tests préalables. (Source : CDC)